Chapitre 99

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        Jenifer est maintenant seule devant l’entrée de l’hôpital. Il pleut et il fait froid. Elle est exténuée et elle a mal partout. Quelle soirée de merde. Elle commence à regretter d’avoir demandé aux infirmiers de sortir cette nuit. Le jeune homme avait probablement raison. Elle aurait pu attendre demain matin. Elle aurait appelé Sébastien et il serait venu la chercher. Enfin, probablement. Finalement, après réflexion, peut-être pas. Il était fou de rage quand elle l’a vu pour la dernière fois. Il ne voudra probablement plus jamais lui parler après ça. Mais elle doit essayer de le raisonner. Il faut qu’il sache qu’elle n’a pas frappé Alice. Comment peut-il croire une chose pareille ? Il ne la connait donc pas ? Si, il la connait, et elle le connait aussi. Il est très protecteur, que ce soit avec Alice ou avec elle. Alors il a probablement réagi sous le coup de l’émotion. Il était surpris et déçu. Mais elle doit arranger ça. Elle va aller le trouver et lui expliquer sa version des faits. Et s’il ne veut pas l’écouter, elle lui écrira. Sa curiosité le fera bien lire le message un jour ou l’autre. Cela ne fait que quelques heures qu’elle ne l’a pas vu, pourtant, il lui manque terriblement. Elle a envie de le voir. Qu’il la prenne dans ses bras et que cet enfer soit terminé. Parce qu’en plus d’avoir mal au corps, elle a mal au cœur. Et elle ne sait pas quelle douleur est la pire. En soufflant, elle regarde les gouttes glisser le long de ses cheveux et aller s’écraser sur le sol. Il pleut assez fort et elle est trempée. Le froid n’arrange vraiment rien à son état. Pour se réchauffer, elle décide de bouger. Elle ne va pas rester ici toute la nuit de toute façon. Elle commence à réfléchir. Elle ne sait pas où aller. Est-ce qu’elle va à son appartement qui est à l’autre bout de Paris ? Sachant que toutes ses affaires sont chez Sébastien. Ou est-ce qu’elle va directement chez le beau brun au risque qu’il la mette dehors ? Non, il ne ferait pas ça quand même ? Si ? Ou alors, elle appelle Franck. Il viendra la chercher c’est sûr. Mais il va lui répéter qu’il lui avait dit que Sébastien n’était pas un gars pour elle. Il va peut-être même appeler Laurent pour venir la consoler. Oh non, elle n’a pas envie de ça ce soir. Enfin… ce soir… cette nuit plutôt. D’ailleurs, quelle heure est-il ? Elle pose ses béquilles et attrape son téléphone portable. Elle remarque qu’elle n’a aucun message ni appel manqué. Visiblement, elle ne manque pas beaucoup à son beau brun. Une larme coule le long de son beau visage. Il faut dire que la fatigue ne l’aide pas à contrôler ses émotions. Elle commence à remettre son portable dans son sac, mais elle se souvient qu’elle voulait regarder l’heure. 1h36. Bon, si elle part tout de suite, elle arrivera en fin de nuit chez Sébastien. Elle pourra dormir un peu sur le canapé et essayer de lui parler demain matin. Puis, si ça ne fonctionne pas, elle récupèrera ses affaires et elle appellera Franck pour qu’il la ramène chez elle. Mais elle espère ne pas en arriver à cette extrémité. Son manager est très gentil. Mais elle sait parfaitement qu’il ne voudra pas la laisser seule. Il appellera du monde, passera tout son temps chez elle et il organisera peut-être même une garde alternée avec David et Thibaut. Alors qu’elle, la seule personne qu’elle aura envie de voir c’est Sébastien. C’est décidé, elle va aller chez lui. Enfin chez eux, si elle peut toujours y habiter. Elle range son téléphone portable dans son sac à main et elle se penche pour attraper ses béquilles tombées au sol. Malheureusement, avec son plâtre, elle n’arrive pas à les atteindre. Elle met sa jambe blessée sur le côté, et retente. Mais rien n’y fait. Un homme qui s’apprêtait à entrer dans l’hôpital s’approche d’elle.

-        Bonsoir, vous avez besoin d’aide peut-être ? sourit-il.
-        Oui s’il vous plait, souffle-t-elle.

Il se penche et ramasse les deux béquilles au sol.

-        Tenez, dit-il en les lui tendant.
-        Merci, sourit-elle.
-        Vous n’allez pas aller loin comme ça, dit-il en la regardant de bas en haut. Vous rentrez comment ?
-        En voiture, sourit-elle.
-        Ce n’est pas vous qui conduisez j’espère, rit-il.
-        Non, je pense qu’avec ce foutu plâtre, c’est impossible. Mon conjoint est venu me chercher, ment-elle.
-        Et il vous laisse seule dans cet état le rejoindre jusqu’à la voiture ? demande-t-il étonné.
-        Oh, euh, non, c’est qu’il est encore à l’intérieur, pour les papiers, alors, je suis partie devant.
-        Vous voulez que je vous raccompagne jusqu’à sa voiture ? demande l’homme.
-        Non, non, merci ça ira, il est garé juste à côté.
-        Comme vous voudrez. Bon, si jamais il y a un souci, vous n’êtes pas loin de l’hôpital au moins, rit-il.
-        Exactement.
-        Bonne soirée, sourit-il avant de s’engouffrer dans l’hôpital.

Béquilles en main, Jenifer peut commencer à avancer. C’est difficile. Elle a vraiment mal. Surtout à l’épaule et au poignet. À chaque pas qu’elle fait avec les béquilles elle doit forcer sur ses bras. C’est très douloureux. Elle a la sensation qu’à tout moment son bras peut se détacher de son corps. Mais elle n’a pas vraiment le choix. Maintenant qu’elle est dehors, autant rentrer plutôt qu’attendre devant la porte. Puis, prendre l’air lui fera le plus grand bien. Elle avance lentement. Chaque pas est une épreuve. Ses vêtements sont imbibés d’eau et deviennent lourds. Ses mains nues sont gelées. Le seul avantage de cette température glaciale mêlée à la pluie, c’est qu’elle commence à avoir tellement froid que la douleur disparait petit à petit. Elle a hâte d’arriver. Pourtant, elle est encore bien loin de la maison. Il faut dire qu’elle n’est pas bien réveillée et qu’elle n’a absolument aucune idée d’où elle va. Elle a la sensation qu’à tous moments elle va s’écrouler au sol. Et s’endormir. Elle en a très envie. Mais le canapé sera plus confortable que le trottoir. Alors, elle continue. Petit à petit, elle se rend compte que les rues ne lui disent absolument rien. Peut-être en allant jusqu’au carrefour, elle reconnaitra quelque chose ? Pas à pas, elle s’en approche. Quand elle y arrive, elle lève la tête et tente de reconnaitre le lieu. Elle regarde les panneaux mais ne voit rien qui lui parle. Elle souffle. Super. Il ne manquait plus que ça. Elle est perdue. Elle s’arrête un peu plus loin et pose ses béquilles contre un mur. Elle ne fera pas deux fois la même erreur. Elle sort son téléphone portable et regarde où elle se trouve. Il lui reste encore une bonne demi-heure de trajet à pied. Enfin, pour une personne normale. Elle peut au moins ajouter un quart d’heure vu le temps qu’elle met pour avancer. Avant de reposer son téléphone, elle jette un coup d’œil sur l’heure. 2h45. Ça fait plus d’une heure qu’elle est partie. Plus d’une heure qu’elle marche. Bon, elle a fait la moitié. Elle range son téléphone en soufflant et récupère ses béquilles. La voilà repartie, cette fois, dans la bonne direction. En marchant, elle réfléchit. Comment va réagit Sébastien demain ? Peut-être va-t-il se réveiller quand elle va arriver ? Il faut dire qu’entre le plâtre, les béquilles, le bandage et l’écharpe, elle va avoir du mal à être discrète. Puis elle se sent vraiment fatiguée. Mais elle doit se préparer mentalement à un rejet de son beau brun. Si c’est le cas, elle n’aura plus jamais d’homme dans sa vie. C’est terminé. Si même Sébastien ne veut plus d’elle, qui en voudra ? Elle secoue la tête. Ça suffit. Ne parlons pas de malheur. Elle devrait plutôt se concentrer sur la route. Il ne faudrait pas qu’elle se trompe à nouveau. Plus elle avance, plus elle a mal à la jambe droite. Il faut dire qu’elle a été plâtrée tendue. Donc il faut qu’elle la soulève légèrement pour pouvoir avancer et éviter qu’elle ne touche le sol. Mais soulever une jambe pendant plus d’une heure et demie demande un effort considérable, surtout quand on sort à peine d’une anesthésie. Elle devrait peut-être faire une pause. Elle lève la tête pour regarder où elle est. Elle connait cette rue. Elle n’est plus loin du tout de la maison de Sébastien. Il ne lui reste que quelques centaines de mètres. Elle avance, à bout de forces. Bientôt elle aperçoit la maison. Enfin. Elle accélère un peu. Arrivée devant la porte, elle appuie ses béquilles contre le mur et fouille dans son sac pour trouver les clés. Mais impossible. Les a-t-elle perdues dans l’accident ? Ou alors elle les a simplement laissées à l’intérieur. Elle tente tout de même d’actionner la poignée, mais c’est bel et bien fermé. Super. Elle ne peut pas non plus aller au chaud dans sa voiture puisque celle-ci est également fermée. Et elle n’a aucune envie de recommencer à marcher jusqu’à son appartement. Il ne lui reste plus qu’à s’asseoir et attendre que Sébastien sorte de la maison. Alice a équitation demain à 10h30. Alors, normalement, ils devraient ouvrir cette porte aux alentours de 9h30. Quelle heure est-il à présent ? Elle regarde sur son téléphone. 3h30. Elle attendra. Elle jette ses béquilles au sol et tente de s’asseoir. Avec son plâtre ce n’est pas chose aisée. Elle finit par se jeter par terre. Aie. Elle appuie son dos contre l’encadrement de la porte d’entrée et tente de s’installer confortablement, sans avoir mal quelque part. Elle abandonne rapidement cette idée. Elle a mal partout et ce n’est pas près de changer. Heureusement un avant-toit la protège de la pluie. Mais pas du froid. Puis, dans tous les cas, elle est déjà mouillée. Alors, fatiguée, elle ferme les yeux et tente de trouver le sommeil. Mais elle n’y arrivera pas.

Y'a comme un hic [Terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant