Il existait bien un moyen de sortir de ce puits puant l'humidité.
Voilà ce que se répétait intérieurement le comte de Varde.
Einar ne savait pas quoi faire.
Se faire rouler dans la farine d'une telle ampleur était déjà en soi humiliant...
Mais en plus, de l'avoir été si bêtement, et avec des conséquences pareilles...
Le vassal d'Helori V se sentait fort impuissant, pour la première fois de son existence.
Ses bottes glissaient lorsqu'il tentait d'escalader la surface rocheuse.
C'est alors que, voyant deux rats se grimper dessus chacun leur tour pour sortir du trou d'eau abandonné, le parrain d'Éléonore eu une idée.
Assez violemment pour ces pauvres bestioles, voilà le noble toujours impeccable appuyer le talon de sa main sur l'un des petits corps.
Puis l'autre.
Aidé de poussées venant de ses mains et de ses pieds, il parvint tel un pratiquant d'escalade à utiliser les deux cadavres comme des appuis.
La montée de dura que quelques secondes, d'ailleurs ce fut surtout le bond final, qu'il effectua en tapant la pointe de ses pieds contre la surface du puits plus que son utilisation des corps de souris qui lui valut sa réussite.
Les genoux écorchés par la montée, Einar s'arrêta quelques secondes.
Le temps de reprendre son souffle et ses esprits.
Néanmoins, il n'était pas pour le moment complètement tiré d'affaire.
Heureusement, la monture qui l'attendait à l'entrée de la petite grotte lui donna de l'espoir.
En espérant qu'elle soit bien la seule présence alentour...
Il se traina donc à l'extérieur, le dernier tiers du corps trempé et sa totalité frigorifiée.
Le comte vardais marcha donc quelques instants, avant de retrouver la noirceur de la nuit.
Sa froideur était abominable, et lorsqu'il découvrir l'absence de son cheval, l'homme se demanda s'il était apte à rentrer chez lui en vie.
Non pas que sur son chemin, il ne pouvait pas trouver la moindre aide.
D'autant plus que même au sein du palais, il demeurait peut-être encore des fidèles de l'ancien régime.
Effectivement, il apparaissait maintenant comme évident pour Einar qu'Éléonore ne se trouvait pas ici.
S'il ne retrouvait pas la trace de ses hommes avant que le froid l'emporte, le vassal du roi pouvait a minima espérer que dans la forêt, il croisa la route de l'une de ces cabanes que la royauté avait fait construire pour ses perdus des bois.
Dans un petit rire jaune, sans joie, le parrain d'une adolescente disparue se remémora les paroles de la fratrie de Xynthia au sujet d'abris souterrains construits par leurs soins - entre autres.
Même à mi-chemin entre l'enfance et l'âge adulte, Cléophée et Eudoxie continuaient de répéter les mêmes balivernes.
Sûrement qu'elles désiraient par là égayer les croyances de leurs cadets, en remplissant leur tête de contes fantastiques et féériques.
Cependant, il est vrai que dans sa situation, le quinquagénaire se prit à croire lui aussi à ces légendes.
Par souci de trouver en lui la force, la motivation de se trainer jusqu'aux profondeurs de la forêt.
Toutefois, il n'y parvint au final jamais.
Les gardes royaux, sous l'ordre de leur maîtresse, se gardèrent bien de préserver la liberté de ce comte traître à la Couronne.