Tandis que les domestiques des cuisines préparaient un repas chaud aux trois sœurs, Einar de Varde faisait les cent pas dans une large pièce faisant office de salon principal du château.
Fallait-il qu'il lance un avis de recherche rémunéré afin que quelqu'un parte à la rescousse d'Éléonore ?
Effectivement, le comte du fief le plus proche du château du suzerain se doutait bien qu'il ne s'agissait que d'une question de temps avant que la princesse ne soit emmenée de force dans ce pays sans foi ni loi qu'était la Décharge.
Là-bas, qui savait ce qu'il pourrait advenir de la jeune fille ?
À la simple furtive pensée qu'elle soit mise à prix tel un bestiau sur un marché, et promise à la vente du plus offrant, son parrain en eu des frissons.
Non, décidément il devait à tout prix dénicher une solution afin de la sortir de là.
Après tout, il n'était certes pas roi, mais un comte disposait quand même d'un pouvoir, d'une influence considérable.
Néanmoins, les circonstances avaient récemment - le mâtin même - considérablement changées.
Que l'on apprenne qu'il se positionne en travers de la reine - et par extension du roi - et c'en était fini de son contrat féodo-vassalique.
Le quinquagénaire au crâne dégarni ruminait.
Il ne pouvait laisser la jeune fille à qui il avait promis à la mère de la protéger dans les griffes de dégénérés, au motif qu'il était trop faible pour accomplir son serment.
C'est alors qu'il entendit les petites servantes porter un repas aux sœurs d'Éléonore.
Cette dernière avait-elle eu la possibilité de souper ?
Quand avait-elle mangé un vrai repas pour la dernière fois, d'ailleurs ?
Ce matin, avant d'être chassée telle une bâtarde du roi marié découverte dans les appartements d'une domestique ?
Einar ne savait que faire lorsque tout à coup, les pas lourds et vifs de quelques uns de ses gardes claquèrent dans ses oreilles.
L'un d'entre eux, lorsque le duo arriva à quelques mètres de leur maitre s'exprima enfin.
Un petit garçon à la face barbouillée de crasse le demandait aux portes du château.
C'était urgent, disait-il, et avait un rapport avec sa filleule Éléonore.
À ces mots, le parrain déjà presque endeuillé se précipita là où la pièce maîtresse de la résolution de son problème se trouvait peut-être.
Si son esprit n'était pas aussi chamboulé, nul doute que l'homme expérimenté se serait nettement plus méfié de ce genre d'associés.
Ses gardes le mirent en garde, cependant parce qu'il ne voyait pas d'autres moyens de voler au secours de sa filleule, Einar de Varde leur intima sèchement de se taire.
Essoufflé, le cœur battant à tout rompre, le père de substitution de la deuxième fille de Xynthia invita finalement Judicaël à entrer dans sa demeure agréablement chauffée.
À l'instar des princesses - dont l'hôte eu la présence d'esprit de ne pas en signaler la présence - il fut servi de quoi se remplir la panse à l'enfant.
C'est alors qu'Einar introduisit sa demande.
Il ferait n'importe quoi pour retrouver Éléonore, quitte à payer très cher.
À ces mots, la réflexion fort éveillée de l'apprenti Mathieu se mit en marche.
À l'instant, il venait de modifier quelque peu ses plans.
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Vantablack 2
HorrorRecueil d'histoires sombres inspirées de : - contes - faits divers - légendes urbaines - mythes.