Vantablack 2

Pupille ~ Chapitre 2

La banquière se racla la gorge puis démarra son récit.

Quelques mois plus tôt, sa mère - pourtant à peine âgée d'une soixantaine d'années - avait commencé à lui faire part de cauchemars étranges qu'elle faisait pendant son sommeil. De plus en plus fréquemment, son esprit endormi lui montrait le film de plus en plus effrayant d'un petit garçon tentant par tous les moyens d'entrer dans sa maison.

Parfois, il frappait à la porte, d'autres fois il lançait une balle violette contre les volets fermés de la confortable demeure de sa mère, la punissant de l'avoir abandonné à sa naissance dans un orphelinat miséreux.

À chaque fois, la réussite du garçonnet à pénétrer dans la maison marquait l'éveil de la vieille dame. Petit garçon qui, à ce jour, aurait été un homme d'un âge proche de celui de sa grande sœur, s'il n'avait pas malencontreusement chuté du haut d'un escalier à l'aube de ses trente-sept ans.

Ce dernier évènement s'était déroulé l'année passée. Peu de temps après, les cauchemars de la grand-mère d'Olina avaient commencé. In fine, on avait retrouvé le corps de celle-ci sans vie dans son lit, sans aucune blessure physique mais le visage figé dans une expression de terreur absolue. La maison étant fermée de l'intérieur et aucune trace d'effraction n'ayant été découverte, on en conclut que l'effroi avait été probablement causé par l'arrêt respiratoire qu'elle avait subit.

Olina ne posa pas de question, comprenant qu'évoquer la mort de sa grand-mère perturbait profondément la fille de cette dernière. Elle termina son petit-déjeuner silencieusement puis sa sœur et enfin son père la remplacèrent autour de la table de la salle à manger.

La matinée fut consacrée au nettoyage rapide de la maison. Halfdan chargea Olina d'aller chercher un balai dans un placard au fond du couloir de l'étage, mais en passant devant la porte de la chambre de son ancêtre, la pré-adolescente ne put retenir une violente curiosité. Comme si une force mystérieuse la poussait vers l'intérieur de cette pièce.

Rabattant sa chevelure dans son dos d'un geste machinal, elle entra précautionneusement, prenant bien garde à faire le moins de bruit possible. Elle avait l'impression que fouler le sol un peu trop vite ou brutalement éveillerait quelque chose... Elle caressa du bout des doigts le lit en bois de santal couleur acajou au sommier recouvert d'une parure épaisse – elle se souvint alors que sa grand-mère était morte en hiver – et brodée.

Procédant à l'examen de la chambre, elle sentit soudain son cœur se mettre à battre la chamade. Dans le tiroir de la table de nuit, cachée tout au fond derrière les photos de la fille encore enfant et de ses petites-filles, une balle violette, ronde et à la surface lisse et brillante avait été rangée là. Olina la saisit entre ses doigts et l'observa minutieusement. Subitement, elle lâcha l'objet qui vint rouler sur le tapis persan, avant d'achever sa course aux pieds d'Annika qui venait soudain d'entrer dans la chambre.

Baissant les yeux vers la sphère en caoutchouc, elle les releva une seconde après vers sa fille. Sans dire un mot, toutes deux comprirent qu'une pièce du puzzle concernant le décès de leur parent proche n'avait pas été découverte.