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Judicaël plantait un regard innocent dans les yeux bleu clair de son naïf bienfaiteur.
Effectivement, n'ayant pas grandi parmi des êtres civilisés, il était parfois difficile pour ce petit garçon d'apprécier la normalité de ses actes.
D'autant plus que là, sous le choc après avoir reconnu même sans tête le corps de son acolyte, le sbire de Sloane d'Écosse ne s'était pas vraiment préoccupé de ce qu'en penserait l'escorte de cavaliers.
Toutefois, leur compatissant chef mis cette singularité sur le compte des actes connus et permettant sa survie, ainsi que sur le lieu d'habitation délétère que devait supporter par défaut ce pauvre petit humain.
- Bon... dit-il afin de rompre le silence parsemé de gêne qui planait dans l'atmosphère. Remets-toi en selle.
Ce que fit Judicaël.
Son cheval suivit la troupe, tandis que le cavalier ne pouvait s'empêcher de garder les yeux sur le corps décapité de Datila.
Quel barbare avait donc pu commettre pareille atrocité ?
Certainement pas l'un des enfants royaux, eux qui avaient été élevés en dehors de toute criminalité...
Soudain, le petit déjà trop au fait des folies que certains adultes commettaient envers d'autres comprit.
Si les enfants étaient protégés par le comte de Varde, nul doute qu'autrui au sein du royaume avait également pu leur fournir une protection.
Et si le reste de la fratrie avait rejoint un parent ayant mis à sa solde un nervi ?
Stipendier un habitant de la Décharge était en effet chose facile, les composants de cette population n'ayant depuis leur naissance pour la plupart pas grand-chose à perdre.
Si ce n'était rien, à l'image d'un Neven par exemple.
Judicaël se sentait maintenant de plus en plus mal à l'aise.
Seul au milieu de nombreux adultes de plus entraînés au combat, qu'allait-il faire si ceux-ci découvraient sa supercherie ?
En effet, il leur avait assuré connaître la position exacte d'Éléonore...
Or, si le plan tournait mal...
En d'autres circonstances, le sauvage Jamarcus Datila aurait couvert ses arrières, mais mort que pouvait-il faire d'autres que lui rappeler sa solitude ?
Pour le moment, l'enfant se calma en se rappelant qu'une fois arrivés aux abords du domaine royal, les gardes de la reine prendraient le relais.
Et ensuite...
Il se prit à éprouver de la pitié pour ce preux Einar, lui qui se battait corps et âme et allait au final prochainement se sacrifier pour sa filleule qu'il aimait tant.
Quant à Stelyos...
Le natif de la Décharge croyait sans formellement le nommer au concept de sélection naturelle.
L'unique fils du roi et de sa première reine avait la bêtise de ne compter que sur autrui, qui plus est sur un inconnu...
Il en payerait donc les conséquences.
Judicaël ricana à l'idée de ce qu'il serait advenu de sa propre vie s'il avait fonctionné sur le fondement de ce même paradigme.
Nul doute que passé ses trois ans, le petit aurait été dévoré par les loups de la Décharge.
Il avait tout au long de sa petite enfance servi d'appât, failli être lui-même vendu plus d'une fois.
Mais à la fin, c'était toujours la bonne personne qui s'entichait de cette jolie petite fille.
