De façon ambivalente, la nuit noire rassurait le trio autant qu'il l'effrayait...
Elles avaient l'impression que les ténèbres les camouflaient à la vue de potentiels individus malintentionnés, tout en les empêchant simultanément de pouvoir les repérer.
Leurs belles robes de princesse cousues main, aux extrémités inférieures depuis longtemps souillées, étaient tachées par-ci par-là de terre jusqu'au col.
Cela faisait maintenant une bonne demi-heure qu'Arabella, Cléophée et Blanche étaient sorties de la forêt.
De ce qu'elles en avaient tirées comme observation, plus personne ne les pistait tel un limier traquant sa proie.
Et s'il s'était agi d'une bête ?
D'une bête sauvage ?
Mais laquelle d'entre elles se serait comportée de la sorte, au vu des relations entretenues avec les enfants royaux et les animaux des bois ?
Le déni permit à la fratrie de supporter la terreur, l'appréhension que l'idée d'être pourchassés déclenchait chez ses membres.
Soudain, la voix mélodieuse de Cléophée rompit le silence :
- Je pense que Stelyos saura où nous trouver.Ayant capté l'attention de ses sœurs, elle leur exposa ensuite sa théorie.
Le petit simplet s'était très certainement échappé avec l'aide d'un cheval, mais aussi d'un chien.
Peut-être que même sans disposer d'un objet comportant leur odeur, ce dernier serait apte à les retrouver ?
Ou alors Stelyos suivra-t-il tout bonnement les empreintes laissées au sol, du terrier jusqu'au lieu où le quatuor s'était séparé ?
Encore une fois, leur cerveau effectua son travail correctement, au court terme du moins.
Il n'existait que peu de doute quant au fait que le plus jeune et, qui plus est, le moins éveillé intellectuellement des enfants ne parviendrait probablement pas à les rejoindre de cette manière-là...
Dans le meilleur des cas, un esprit objectif pouvait tout au plus espérer que le petit, s'il ne s'arrêtait pas perdu au beau milieu des bois après avoir miraculeusement réussi son opération, ait l'idée de se rendre auprès de leur parent le plus physiquement proche.
Et en l'occurrence, il s'agissait bien du comte de Varde.
Néanmoins, c'était sans compter sur la stupidité couplée à l'immaturité et au manque de sagesse inhérente à son jeune âge.
Un enfant était émotionnel, faible et influençable par nature.
De ce fait, le garçonnet pouvait aussi bien se faire enlever au cours de son retour dans la forêt, et ce avant même de s'être rendu comme prévu aux abords du terrier de Panpan.
Il avait été plus qu'inconscient et irraisonnable d'envoyer seul le petit Stelyos accomplir pareille mission.
De façon plus sage et pragmatique, il aurait fallu agir en groupe, deux des sœurs s'arrangeant pour déjouer l'attention des gardes, la troisième s'affairant à protéger les arrières de leur frère et à donner l'alerte au duo en cas de besoin.
Ç'avait été du suicide pour le petit garçon, de le mener effectuer seul aussi dangereuse, aussi risquée opération.
Visiblement, les enfants trop choyés sous-estimaient d'une façon bien périlleuse leur marâtre régnant en maître sur l'ancien château de leur mère.
Sa cruauté ne leur était manifestement pas encore totalement apparente, pourtant au vu de la suite des événements elle allait à coup sûr enfin le devenir.