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Lacerta ne savait pourquoi elle avait agi ainsi.
Elle connaissait parfaitement les risques, pourtant.
Bien que la loi était d'ordinaire relativement douce, la venue de la dragonne de l'Ouest était depuis passée par là et et, en conséquence, l'indulgence des juges avait été quelque peu modifiée.
Sa sombre réputation avait rampé même jusqu'au plus inaccessible recoin du royaume.
Pour le coup, la célébrité de l'occupante du château royale était fondée.
Cependant, condamnation hypothétique ou non, en aucun cas Lacerta ne pouvait laisser une, et qui plus est deux enfants dehors, en pleine nuit et pourchassées par un loup.
En l'espèce, elle-même en élevait deux, des lardons.
Avec son mari, un garde vardais, ce qui expliquait d'ailleurs leur souhait passé d'habiter si près de la demeure d'Einar de Varde.
Là, son époux était en fonction, elle était donc seule avec quatre minots dans une certes ravissante, mais petite maison.
Yuka et Carméla tremblaient de la tête aux pieds lorsque la mère de famille leur avait ouvert sa porte.
Cet acte avait laissé ses deux enfants pantois, éberlués.
Risquer que l'opprobre entache la réputation de cette simple et respectable famille, voire même les mette en danger était en effet un péril dont Lacerta était consciente.
Néanmoins, elle savait également qu'en aucun cas, la créature démoniaque courant après deux petites filles n'avait l'autorisation d'entrer en son domicile.
L'avantage d'avoir épousé un combattant, c'était qu'on avait à disposition une myriade d'armes bien plus sophistiquées que quelques couteaux de cuisine émoussés ou un balai.
Nul ne savait ce que son mari déciderait qu'ils fassent de ces deux mominettes.
En attendant la fin de son service, tout ce que sa courageuse épouse pouvait faire, c'était rassurer tout ce petit monde.
Le gros avantage lorsqu'on avait un voisinage peureux et immoral, c'était que celui-ci n'ayant pas daigné ouvrir ses fenêtres, la possibilité de savoir où étaient protégées les petites filles de l'ancienne bonne reine s'avéraient heureusement fort minces.
Néanmoins, Lacerta savait qu'elle devait se méfier.
Des charognes délatrices prêtes à tout pour grappiller le moindre billet, dans le coin il y en avait un paquet.
Les pires se trouvant un peu plus loin dans la rue...
Fixées par quatre paires de globes oculaires sombres et pleins d'appréhension, l'adulte de la maison comprit qu'elle devait prendre une décision.
Poussant un long soupir, elle leur indiqua ceci :
- Je vais les cacher en bas.
Elle était là tournée vers ses deux fils, ironiquement de l'exact même âge que Yuka et Carméla dont elle demanda le prénom.
Effectivement, la maison se trouvait en hauteur et comportait un minimum d'espace nécessaire à la vie commune de quatre personnes, entre son rez-de-chaussée, ses comblés aménagés dotés d'une mansarde ainsi que son sous-sol également rénové.
Toutefois, Lacerta disposait bien d'un moyen de camoufler l'infraction saugrenue et cynique qu'elle commettait.
Sans un mot, elle fit signe aux deux petites sœurs d'Eudoxie de bien vouloir la suivre.
Yuka suivit Carméla en la tenant encore par la main, le col toujours souillé d'un sang sombre qui fascinait avec horreur Florent et Damien.
Des princesses dans leur maison, c'était un sacré événement.
