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De nouveau, l'obscur Neven prit la place de Mathieu.
Récupérant l'épée de ce dernier, il prêta attention au seul son des parages, à savoir celui des pas de son acolyte se rendant dans le carrosse au sol souillé de sang chevalin.
Il fallait en effet que l'une des deux nounous dorme avant que la seconde ne quitte son service.
Le grand blond au carré ne posa pas un instant ses yeux bleus sur les deux enfants dont il avait la garde, ces derniers l'évitant également soigneusement.
Ils étaient assis collés l'un à l'autre, conscients du danger auxquels ils étaient exposés et attendant chacun de leur côté que l'un des leurs au minimum vienne les sauver.
Les mains cachées sous leurs aisselles, Éléonore et le bambin bourgeois patientaient sans oser demander quoi que ce soit.
Sentant sa vessie remplie - Mathieu avait fait bouillir de l'eau pour les hydrater avant de leur donner de quoi manger - l'adolescente comprit que si elle se trouvait dans pareille situation, pour le petit cela devait être pire.
Les yeux braqués sur les mèches dansantes du foyer, elle demanda d'une petite voix à Neven si elle et le petit pouvaient aller effectuer leurs besoins.
L'homme grogna.
Il aurait dû s'y attendre, une fille et un enfant disposaient d'une bien plus petite vessie que lui.
Poussant un soupir, il constata qu'il n'avait d'autres choix que d'accéder à leur demande, sans quoi il allait prochainement devoir supporter deux boulets puant l'urine à ses côtés.
Ce qui ne l'enchantait guère.
Neven acquiesça la mine toujours aussi sombre avant de leur ordonner de se dépêcher.
Éléonore prit la main du petit - elle l'aurait bien porté mais craignait qu'il ne salisse sa robe déjà bonne pour une lessive - et tous deux suivirent les consignes de leur séquestreur.
En effet, le méfiant tueur à gages ne se risquait pas à ce que ceux-ci lui fassent une entourloupe.
Effleurant la neige avec la lame de l'arme de Mathieu qu'il avait lui-même dérobé quelques temps auparavant, le mercenaire leur envoya implicitement un message clair.
Qu'ils crient, fuient ou tentent de l'attaquer et ils auraient la tête tranchée.
Cela embêtait évidemment Neven, et Mathieu risquerait bien de souhaiter lui faire connaître le même sort en représailles des gains faramineux manqués.
Toutefois il comptait sur l'instinct de survie de ses captures pour qu'ils se tiennent, restent parfaitement obéissants.
Tout du moins pour Éléonore, qu'elle n'ait pas la profonde bêtise de réitérer l'erreur commise durant son absence avec son complice.
S'il se serait trouvé à la place de celui-ci, nul doute que l'assassin se serait montré bien plus méchant.
Tuer son précieux chien avait été une bonne initiative - bien qu'il n'ait en réalité pas eu beaucoup d'autres choix pour préserver sa propre sécurité -, cependant gamine ou pas elle aurait mérité quelques coups de pieds selon son opinion.
Traiter correctement les marchandises étaient le meilleur moyen de leur donner un espoir de fuir, croyait Neven.
En réalité, s'il s'était montré attentif il aurait remarqué que bien que lui vouant d'un côté une haine farouche en raison du décès de son chien, Éléonore ne semblait pas complètement abhorrer le rapteur aux yeux d'asiatique un brin sympathique, agréable sur les bords.
