Quelques jours plus tard.
Douze couchés de soleil se sont produits devant mes yeux depuis mon réveil. Confortablement installé dans ce lit, je n'en suis sortie que lorsque Steve est venu s'occuper de moi, pour m'accompagner à la salle de bain. Les multiples tentatives de mes amis pour me faire avaler quoi que ce soit se sont heurtées à un mur invisible que je tente désespérément de garder entre le reste du monde et moi-même. Chaque jour, je reçois la visite de chacun de mes amis, abordant un nouveau sourire forcé derrière leur inquiétude à chaque nouvelle visite. Chacun essaie de passer du temps avec moi à leur façon, mais je me désintéresse rapidement de leurs histoires, observant les rares oiseaux passer devant la fenêtre. Les belles histoires que Thor vient me raconter deux à trois fois par jour n'éveillent plus en moi la moindre étincelle, alors que j'en étais insatiablement friande quelques années plus tôt. Ce dernier a dû finir par abandonner son combat pour moi, puisqu'il est parti sans même me dire au revoir. Natasha m'a expliqué qu'il devait retourner auprès de son peuple qui attendait impatiemment son retour, mais ça n'a pas vraiment d'importance pour moi. Qu'il soit parti se battre pour une noble cause ou qu'il m'ait abandonné, je comprends et accepte son départ. Même l'espionne commence à perdre son sang-froid face à ma situation.
Parce qu'en dehors des rares moments où Steve essaie de me stimuler pour le bien de mon corps, j'imagine que j'ai plus de point commun avec un brocolis asséché qu'avec un oiseau en plein vol. Même si mes efforts ne sont que très minces, je ne parviens pas à contrôler une seule partie de mon corps. Mes doigts semblent aussi lourds que du plomb, et lorsque Steve m'emmène aux toilettes par simple précaution, mon corps flageole comme un spaghetti humide qu'on ne pourrait pas sécher. Mon manque de réaction a fini par énerver Natasha, qui m'a secouée et hurlé dessus hier soir, en essayant une énième fois de me faire décrocher un mot. Mais je n'y arrive pas. Je n'arrive pas à sortir de cet état. C'est comme si mon âme était coincée dans un corps qui ne lui appartenait pas, et qui refuse entièrement de répondre à ses appels. Quoi qu'il en soit, je comprends l'absence de Natasha aujourd'hui.
Le soleil se couche une nouvelle fois, me laissant croire qu'il doit être aux alentours de vingt heures. L'obscurité viendra bientôt nous embrasser. Je l'attends chaque jour avec impatience. Mais elle n'a plus le même goût que dans mes souvenirs. Elle est plus menaçante, prête à engloutir tout ce qui lui passe sous ses longs doigts griffus. Je ne remarque l'approche de Steve que lorsque ce dernier glisse ses mains sous mes bras pour m'aider à m'assoir dans le lit. A cette manœuvre, je sens mes muscles se tendre pour contraindre mon corps à ne pas s'écrouler comme celui d'une poupée en mousse.
« J'ai compris que mes plus grands efforts en cuisine ne serviraient jamais à rien, soupire-t-il. Alors je suis allé chercher à manger dans ton restaurant préféré. Je ne savais pas ce que tu voulais, alors j'ai pris sans vraiment réfléchir. Mais je crois que tu aimes bien cette soupe... enfin, je ne sais plus comment elle s'appelle, mais je sais que tu l'aimes. »
Presque deux semaines se sont écoulées depuis mon réveil, et c'est la première fois que j'arrive à tourner la tête pour lui faire face. Mes yeux tombent sur les plats qu'il dispose sur la table d'hôpital près du lit. De la soupe miso. Je ne mange jamais dans un restaurant asiatique sans en commander. Son odeur salée me caresse les narines un peu trop brutalement à mon goût, mais je ne bronche pas. Steve a aussi pris un plat de riz avec du porc au caramel, et un assortiment de sushis qui me semblent trop nombreux pour moi seule. Il pourrait manger tout ce qu'il y a sur ce plateau à lui tout seul.
« Tu veux essayer ? »
Je n'arrive pas à lui faire entendre une quelconque réponse. Tout ce que je parviens à faire est de suivre ses mains des yeux alors qu'il essaie de remplir une cuillère de soupe. Tout en prenant mon menton entre ses doigts, il relève un peu mon visage et place la cuillère près de mes lèvres. Bien que je ne bouge pas, il ne me force pas la main. Mais après un effort, j'arrive à bouger la mâchoire. Ses yeux brillent subitement, emprunts d'une victoire dont il ne compte pas se cacher. Le liquide hautement salé et un peu trop chaud à mon goût me réveille d'une faim dont je n'ai pas tenu compte depuis mon réveil. Steve prend le temps de m'aider à manger, bien que ce soit si long et fastidieux que la fin de la soupe ait refroidie. Bien que sa victoire lui laisse pousser des ailes, il n'arrive à me faire avaler qu'un quart d'un verre d'eau avant que je perdre entièrement mes forces et mon envie de manger. Steve soupire mais accepte sa défaite, et continue de manger seul.
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How Villains Are Made - MARVEL
FanfictionL'hydre à plusieurs visages rampait dans l'ombre du SHIELD depuis sa défaite lors de la seconde guerre mondiale, attendant patiemment dans les ténèbres silencieuses que son heure vienne enfin. Plus le temps passait et plus son pouvoir grandissait, d...