Chapitre 49 : Corbeau à la bonne étoile

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Le lendemain.

Cimetière militaire de Washington DC.

Steven Rogers.

Comme pour ne pas faire défaut aux paroles de Sam, quelques journalistes se sont mêlés aux personnes venues pour dire adieu à Maximilian Pierce. Quelques-uns de ces visages me sont familiers, mais j'ignore si elle connaissait la moitié des personnes présentes aujourd'hui. Peut-être que ceux que nous ne reconnaissons pas sont des membres de l'organisation ennemie, puisqu'elle en faisait partie à l'origine. Mais même si c'était le cas, aucun de nous ne semble d'humeur à questionner ou à arrêter qui que ce soit. Ils pourraient porter le logo de l'hydre au crâne rouge, je ne leur en tiendrais pas rigueur. J'ose imaginer que personne ne se rendrait à l'enterrement de quelqu'un qu'il ne connaît pas, ou qu'il n'appréciait pas un minimum. Peu importe la nature de leur relation, si elle n'était pas fondée sur de mauvais sentiments, alors eux aussi ont le droit de lui dire au revoir. Mais s'il y a bien une présence qui m'agace, c'est celle de ces huit personnes qui osent prendre des photos et des notes de l'évènement. Une seule phrase a suffi pour éveiller de l'admiration envers elle. Maximilian Pierce est morte en héros. C'est d'ailleurs ce qui est écrit sur cette pierre tombale, nous rappelant à quel point elle était aimée et admirée par les siens. Une jeune femme au fort caractère, qui a tenté jusqu'à la fin de préserver ce à quoi elle tenait le plus. La liberté, l'égalité, et l'amour. Malheureusement, elle ne connaîtra désormais plus ces trois valeurs qui lui sont chères. Et... en toute honnêteté, je ne suis pas certain qu'elle ait réussi à sauver quoi que ce soit. Enfin, surtout pour elle. Elle est morte. Je ne sais pas si l'on peut parler de liberté face à la mort, ou même d'une quelconque égalité. Nous, avons survécu à l'attaque. Pas elle. Et l'amour... eh bien, c'est cette chose pour laquelle elle se battait si fort qui a fini par la tuer.

La cérémonie n'a pas duré très longtemps, pour le soulagement de Peter qui commençait à ne plus supporter la présence d'autant de personnes autour de lui. De tous les membres de l'équipe, il est sans doute celui qui en a été le plus affecté. Je ne connais pas sa relation exacte avec Maximilian, mais il est certain que c'était lui qui la connaissait le plus. Ils avaient une certaine complicité plaisante à voir, se suivant dans les bêtises de l'autre s'ils pensaient que ça pouvait être amusant. Un comportement qui aurait pu être dangereux pour n'importe qui, à ceci près qu'ils ont au moins la chance de pouvoir réfléchir un minimum avant d'agir. Les mains dans les poches de sa veste noire, Peter lance un regard loin devant lui, comme pour empêcher ses larmes de couler. Natasha, Sam et Maria, eux, n'ont pas empêché leurs sentiments de s'exprimer.

S'il y avait une raison pour laquelle j'empêchais encore cette boule d'éclater dans ma gorge, je n'arrivais pas à la trouver. Lorsque j'ai appris qu'elle n'avait pas survécu, j'ai d'abord eu envie de hurler. Puis, les larmes ont coulé, et j'ai passé la nuit à regarder le plafond de mon appartement. Et je m'en suis voulu. Malgré les apparences, je suis certain que Maximilian était quelqu'un de bien, dans le fond. J'avais désir de le découvrir, d'en apprendre plus sur elle, et surtout, je voulais l'aider. Elle me paraissait quelques fois fragiles, lorsque le sujet de Bucky était posé sur la table. Elle devait en avoir vu de toutes les couleurs, et j'aurais aimé lui montrer que la vie n'est pas uniquement faite de nuances sombres. Hélas, j'ai échoué. Comme un idiot qui trébuche en montant les marches trop vite, je n'ai pas pris le temps d'examiner la situation sous tous ces angles. J'ai couru sans réfléchir, me disant qu'elle allait bien et que tout allait bien se passer... si seulement j'avais pu voir la vérité en face. Peut-être que j'aurais pu la sauver. Elle m'aurait sans doute détesté, mais elle serait encore en vie aujourd'hui. Je soupire longuement et enfile mes mains dans mes poches, cherchant un peu de réconfort dans la chaleur du polyester. Puis, alors qu'un silence secoué de larmes nous abritait du monde, des bruits de pas se font entendre derrière-nous. Peu certains, nous nous retournons pour voir un homme s'approcher. Il semble approcher la quarantaine, frêle mais robuste du haut de sa – très – grande taille. Son visage est tiré par un large sourire, montant jusqu'au bord de ses grandes lunettes carrées posées sur son nez crochu. Si j'étais un enfant devant un dessin-animé, je l'aurais pris pour le méchant. Pourtant, quelque chose de bienveillant flotte dans ses grands yeux globuleux aux cernes sombres.

« Oh... Docteur Chang, engage Peter. Vous êtes venu, vous aussi...

- Hélas, je ne pouvais pas me déplacer plus tôt, répond l'homme. J'avais un travail des plus importants à terminer, avant de finalement vous retrouver. Vous me voyez désolé d'arriver si tard.

- Qui êtes-vous ? Demande Natasha.

- Je m'appelle Timothy Chang, je suis médecin au service d'Hydra, se présente-t-il. Enfin... j'utilisais leurs laboratoires, mais je n'ai jamais vraiment servi le secrétaire Pierce. En revanche, j'appréciais beaucoup de travailler avec Maximilian. Elle n'est pas très douée en sciences, mais elle est très curieuse et observatrice. C'était surtout aux côtés de sa mère, que je travaillais le plus.

- Toutes nos condoléances, soupire Maria.

- Oh, mais ne vous inquiétez pas, sourit-il. »

J'arque un sourcil alors qu'il se penche pour jeter un œil à la pierre tombale devant laquelle nous nous trouvons. Il met ses mains dans ses poches et soupire longuement, puis il ramasse l'un des bouquets de fleurs posé au sol.

« Cet endroit est magnifique, dit-il. Hélas, je crains fortement que vous perdiez votre temps, à pleurer ici. »

Il tend le bouquet de fleurs vers Natasha. Le visage tordu entre l'incompréhension et la colère, elle le récupère doucement et préfère analyser la situation. Quant à moi, l'envie de l'étrangler monte si haut que je me demande pourquoi je suis encore sur place.

« Ce n'est pas ici que vous la trouverez, informe Chang.

- Comment ça ? Demande Peter.

- Il arrive quelque fois que même les plus sombres des corbeaux aient une bonne étoile qui veille sur eux. »

Timothy Chang glisse ses mains dans les poches de sa veste noir, puis soupire lourdement. Son regard se perd un instant sur le paysage macabre, avant de se tourner vers Peter. Une lueur inquiétante habite ses grands yeux bruns ; mais quoi qu'il ait à nous dire, nous sommes prêts à écouter toutes les folies dont il soit capable. Pourvu que cela nous apporte l'ombre d'une bonne nouvelle inattendue.

« Lorsque les héliporteurs ont chutés, je me suis rendu sur les lieux afin d'aider à soigner les soldats blessés, de tout camp confondu. Cette guerre me semblait inutile, et j'espérais pouvoir mettre un grain de douceur sur les plaies de ceux qui se sont battus pour des intérêts si idiots. J'étais donc sur place, lorsque celle que vous pleurez a été retrouvée dans le lac. Contrairement à ce que les autorités ont annoncées... son cœur battait toujours. Difficilement, mais suffisamment pour la garder en vie.

- Elle a survécu ? Demande Natasha.

- Et si vous veniez le voir par vous-même ? Propose-t-il. Ce n'est pas très loin d'ici. Ce sera ainsi plus simple de vous expliquer la situation. Car, voyez-vous... il arrive quelques fois que certains miracles arrivent avec leur lot de tempêtes. Et il semblerait que celles-ci soient assez importantes pour que j'ose vous dire de ne pas trop en attendre de cette nouvelle.

- C'est-à-dire ? Demandais-je.

- Maximilian Pierce a survécu, oui, affirme-t-il. Mais le prix à payer n'est pas des moindres. »

Pour nous apporter une bonne nouvelle, cet homme peu repasser dans une autre vie. Si Maximilian a survécu, alors nous avons largement de quoi nous réjouir. De quoi cet étrange médecin parle-t-il, lorsqu'il mentionne un prix à payer ? Quel genre de prix devrait-on avoir à payer pour survivre dans ce monde ?

How Villains Are Made - MARVELOù les histoires vivent. Découvrez maintenant