Chapitre 162 : Ce qui a été perdu

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            Les jours qui ont suivi ma prise de conscience se ressemblent et se répètent, comme la plus triste des musiques écoutées en boucle revient nous détruire à chaque fois que ce passage en particulier nous fait monter le son, nous arrache quelque chose au fond de nous, puis revient encore et encore pour nous faire ressentir cette dévastation intérieure à l'infini. Mes journées ressemblaient à celle d'une pauvre adolescente souffrant d'une peine de cœur dans une série américaine bien clichée et ennuyeuse. Je passais la plupart de mon temps avec un casque sur les oreilles, non pas pour écouter une quelconque douce mélodie, mais pour que l'étanchéité de l'objet me prête un instant de silence. Quelques fois accroupie les genoux dans les bras, j'ignore les vaines tentatives du monde pour me rappeler à lui. Je veux seulement qu'on me laisse tranquille.

Je pensais que tout finirait par s'arranger. Mais rien ne changera jamais.

La lune illuminait déjà le ciel depuis plusieurs heures lorsque je me suis rendu compte de sa présence. Elle n'a jamais été aussi belle que ce soir, si pleine et lumineuse dans un ciel épargné par les lumières de la ville, qui ont considérablement réduit depuis ces deux derniers mois. C'est la première fois que je parviens à voir les étoiles aussi distinctement depuis le nord de la ville, accoudée à la table sur le plus grand balcon de l'étage. Malgré le paysage paradisiaque qui s'offre à mes yeux, je ne parviens pas à en profiter un seul instant. Ni les étoiles, ni les lumières dans le ciel, ni les paroles de mes camarades ne parviennent à me sortir de cet état de lassitude total.

« Tu sais, je pense sincèrement que tu devrais faire une pause, propose Steve.

- Une pause... ? Pour quoi faire ? Ricane Natasha. Pour qu'un autre taré de l'espace puisse nous attaquer de nouveau... ?

- Je crois que les probabilités que ça arrive sont assez minces.

- C'est également ce qu'on croyait avant. Au point qu'on ne s'était jamais posé la question. Et pourtant, ça nous est tombé dessus.

- Natasha... »

Steve fronce les sourcils en me montrant du bout du menton. S'il pense que je n'ai pas fait attention à son geste, il se trompe entièrement.

« Ce n'est pas comme si elle nous écoutait, de toute façon, soupire l'espionne.

- Ne dis pas ça.

- Depuis qu'elle a ouvert la bouche la dernière fois, elle ne l'a plus refait.

- Ça ne veut pas dire que ses oreilles ne fonctionnent plus, Nat.

- Et alors ?

- Tout ce que je te demande... c'est d'y aller doucement, d'accord ? La situation est déjà assez compliquée comme ça. On ne peut pas se permettre de l'aggraver.

- De l'aggraver... ? »

Natasha semble perdre son tempérament, comme souvent ces derniers temps. Elle semble de plus en plus sur les nerfs, et ne parvient plus à avoir une conversation avec Steve sans finir par lui hurler dessus. Elle est si tendue que l'air en devient lourd et menaçant. Je ne l'avais jamais vue comme ça.

« Comment est-ce que tu veux aggraver son cas, Steve ? Elle est déjà fichue, on ne peut pas faire pire.

- Je t'interdis de dire ça, râle Steve. Elle a simplement besoin de temps, et tu le sais très bien.

- De temps ?! Mais combien de temps devra-t-on attendre encore, hein ?! Un an ? Deux, trois, dix ?!

- Autant qu'il le faudra.

How Villains Are Made - MARVELOù les histoires vivent. Découvrez maintenant