Chapitre 84 : Sokovie -pt.1

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Sokovie.

Depuis ce qui est arrivé à Washington, je ne me suis pas demandé de quoi mon avenir serait composé. Après tout ce que j'ai vécu ces dernières années, j'étais persuadée que plus rien ne pouvait m'étonner et que, quelque part, j'avais déjà tout découvert. Une fois encore, mon erreur de jugement pourrait bien m'être fatale. Habitée par le désir de protéger ce qui m'est cher, je me suis aveuglément lancée dans une guerre insensée entre des êtres humains et des robots contrôlés par une intelligence artificielle, créée par le plus grand génie du pays. Je me sens prise au piège, comme engagée dans un contrat que je n'ai pas lu avant de signer, menottée à un destin dont je ne suis pas maître. Et pourtant, lorsque mon regard se pose sur la ville de laquelle nous nous approchons, aucun doute ne me submerge. La simple présence de ces quelques humains autour de moi génère une certaine douceur dans mon cœur, bien que la situation ne s'y prête pas. Peut-être que je me dirige droit vers la mort, peut-être que je m'apprête à commettre la plus grosse erreur de mon existence, peut-être que je m'apprête à essuyer le plus gros échec de ma vie. Mais quoi qu'il arrive, je sais que je ne serais pas seule. Je sais que si je me retourne trop tard, si je tombe dans des gravats, si mon sang s'étale sur le sol de ce pays en guerre, je ne serais pas seule. Et c'est là qu'est toute la différence, par rapport aux évènements de Washington. Je n'ai pas peur de mourir dans un coin isolé de cette ville, poignardée sans aucune pitié, parce que je sais que ça n'arrivera pas. Je sais que si la vie devait me quitter, quelqu'un sera à mes côtés pour adoucir mon départ. Mais il reste une chose qui m'effraie sans limite : que les rôles soient inversés et que, impuissante, je tienne dans mes bras le corps encore chaud d'un camarade qui s'éteint. Si cela devait arriver... je ne m'en relèverais sans doute plus jamais. Si je perds mes appuis actuels, je n'en trouverais jamais d'autres assez solides pour me tenir debout. Et de toute façon, je n'aurais pas envie d'en chercher de nouveaux.

Le Quinjet se pose à la sortie de la ville. Nous descendons les uns après les autres, suivant à la lettre les ordres de Captain. Nous avons décidé de partir des extrémités pour évacuer la population, mais nous ignorons en réalité si nous arriverons à tous les sauver. Pietro s'occupe de courir au centre de police pour prévenir les officiers, pendant que Wanda pénètre les esprits pour contraindre les civils d'aller se mettre à l'abri. Je frappe aux portes, tente de m'adresser le plus clairement aux familles, qui ne posent pas beaucoup de question avant de commencer à partir. Après tout, pourquoi douteraient-ils de la parole d'une inconnue lorsqu'ils aperçoivent les Avengers dans le coin. Plus nous approchons du centre-ville, plus nombreux sont les habitants, et plus l'évacuation demande de temps.

« Je me demande combien d'habitants compte le pays, demandais-je. Ces gens n'auront sans aucun doute nulle part ou aller lorsque la bataille sera terminée... ce sera difficile de les reloger.

- C'est pour ça qu'on ne peut pas se permettre d'échouer, répond Steve. On doit pouvoir les protéger et les laisser rentrer chez eux.

- Ton optimisme est craquant, mais je doute qu'il soit suffisamment réaliste par rapport aux évènements.

- Oh, son optimisme est craquant, plaisante Tony.

- Tais-toi et occupe-toi de ton travail, rageais-je. »

Steve me lance un regard amusé, alors que je m'éloigne pour aider les véhicules à circuler. Les civils coopèrent sans créer d'esclandre, ce qui nous permet de mieux assurer leur sécurité. En revanche, il fallait s'attendre à ce que des bouchons se créent au niveau de la sortie de la ville. Lorsque j'arrive près du pont, je déplore le nombre de voitures qui tentent de partir. Ils risquent de ne pas tous pouvoir s'en aller à temps. Je me tourne vers l'horizon, réfléchissant un instant. Peut-être que l'optimisme de Steve n'est vraiment pas le bon comportement à avoir pour cette mission. Ces habitants ne s'en sortiront pas tous. Alors que mon regard se perd sur la forêt Sokovienne, un tremblement me chatouille les pieds. Les vibrations grandissent de plus en plus, alertant les civils qui se mettent à paniquer. Le sol se fissure entre mes jambes, me faisant arquer un sourcil. J'ai à peine le temps de prendre ce qui se passe qu'une partie du sol commence à s'affaisser. Steve m'attrape vigoureusement par le bras et me tire en arrière, jusqu'à ce que le sol cesse de nous tomber sous les pieds. Je trébuche à cause des secousses, les fesses claquant au sol. Des robots sortent des fissures et commencent à attaquer tout ce qu'ils rencontrent. Je charge les batteries de mes manchettes et attrape mes couteaux de lancer pour défendre la ville comme je le peux. Je saute sur un robot pour planter une lame dans ses circuits, puis ratterris sur mes pieds. On dirait qu'Ultron est en colère contre nous. Alors que j'envoie un robot sur Steve d'un coup de pied, je perds de nouveau l'équilibre à cause d'une secousse plus forte. Des explosions retentissent au loin, ne présageant rien de doux. Je jette un œil au pont qui se brise en deux, le cœur lourd. Les immeubles de l'autre côté s'éloignent peu à peu, comme si... nous prenions de la hauteur. La ville est en train de quitter la terre-ferme. Le sol s'éloigne de plus en plus de nous, laissant les nuages s'approcher petit à petit. Comme un réflex, je me tourne vers le génie pour avoir une réponse.

« Stark, qu'est-ce qui se passe ? Demandais-je.

- Il y a un réacteur sous la ville, informe-t-il. Ultron l'a mis en marche... on a décollé du sol.

- Ça craint.

- Je ne te le fais pas dire, répond Steve. »

Les robots d'Ultron profitent du désordre causé par la crainte pour attaquer. Certains se mettent en hauteur, leurs yeux virant au rouge lorsqu'Ultron prend leur contrôle.

« Voyez-vous cela ? La beauté-même... L'inéluctabilité. L'ascension, avant la chute. Vous, les Avengers, vous êtes mon météore. Ma fulgurante et terrible épée. Et la terre va s'ouvrir sous le poids de votre échec. Eradiquez-moi de vos ordinateurs, retournez ma propre chair contre moi... peu m'importe. Lorsque la poussière retombera, les seuls êtres vivants de ce monde seront faits de métal. »

Une grimace m'échappe alors que je lance un regard vers Steve. Lorsque je remarque que la lueur d'espoir dans son regard commence à faiblir, je perds complètement foi en notre combat. La bataille s'annonce rude, et la victoire n'est qu'une chimère à laquelle nous ne pouvons pas croire. Nous n'allons pas nous en sortir vivant. Mais nous allons mourir en essayant.

How Villains Are Made - MARVELOù les histoires vivent. Découvrez maintenant