Maximilian Pierce.
J'aurais probablement préféré que le silence m'enveloppe pour toujours. Mon âme installée dans le creux des bras de l'obscurité et du silence, j'aurais pu m'habituer à ce calme et cette douce harmonie pour le reste de mon existence. Enserrée contre son sein si frais et confortable, mon sommeil promettait de se prolonger. Ce n'était cependant pas compté sur la chaleur acre et amer qui glisse lentement entre mes lèvres, puis le long de mon œsophage, pour finalement s'installer dans le creux de mon estomac. Lorsque les bras de l'obscurité tentent de me relâcher, je les supplie de n'en rien faire. Si ma seule paisibilité se trouvait ici, je ne voulais en aucun cas m'en éloigner. Des palpitations auprès de mes seins me laissent comprendre que mes supplications ne seront pas efficaces. Je ne veux pourtant pas me réveiller. Je le refuse. Une lumière m'éblouie lentement, jusqu'à en devenir si aveuglante qu'une brûlure intense me prend la rétine. J'aurais voulu me frotter les yeux pour la faire disparaître, mais mon corps ne répond à aucun de mes appels. Je me souviens alors de l'odeur de la forêt, chaude et boueuse à cause de la terre retournée par le combat. Je me souviens du sang sur les lances entre mes mains, des coups, des cris. De mon cri. Je me souviens pourquoi il est sorti si puissamment de ma gorge. Je me souviens pourquoi mes cordes vocales sont si douloureuses.
Il y a des dettes que personne ne pourra jamais entièrement rembourser. Il y a des dettes qui ne sont tout simplement pas payables. Mais je pensais pouvoir m'acquitter de ma dette envers les vies que j'ai enlevé en en sauvant d'autres. J'ai sauvé l'entièrement du monde humain trois ans plus tôt, risquant ma vie sur une ville flottante pour épargner le plus de monde possible. Il semblerait pourtant que ce ne soit pas suffisant. Mais ça me semble si injuste. N'ai-je donc pas assez donné ? N'ai-je donc pas assez souffert ? Toutes ces vies que j'ai prises ne seront-elles donc jamais satisfaites de l'horreur que je dois supporter au quotidien ? J'ai dû perdre la première personne que j'ai sincèrement aimé, au point d'en être si terrifié qu'il hante mes cauchemars encore des années plus tard. J'ai dû trahir et tuer mes plus grands amis de l'époque. J'ai dû perdre mon meilleur ami, et j'ai choisi d'épargner son assassin et de lui pardonner malgré la douleur que cela m'apporte au quotidien. J'ai dû perdre la nouvelle famille que je m'étais faite malgré tout. J'ai dû encore souffrir de cauchemars plus violents, j'ai dû affronter une peur et une douleur insupportable. Je croyais avoir assez donné. Je croyais que je pourrais m'acquitter de ma dette. Je n'ai pas seulement dû perdre mon premier amour, mais également mon véritable amour. J'en ai assez donné. Ce n'est pas justifié. J'ai sauvé tant de monde. J'ai aidé tant de monde. Je méritais de m'en sortir, moi aussi. Mais c'est fichu. Et même l'obscurité, si douce et affectueuse, commence à m'abandonner.
« Il faut que tu te réveilles, m'appelle-t-on. »
Je ne le veux pas. Pourtant, mon corps répond progressivement à cet appel. Mes paupières commencent à s'ouvrir, aussi secs qu'un désert en pleine période sèche. Il est sans doute plus probable de trouver de l'humidité au Sahara qu'entre ma rétine et ma paupière. Il est sans doute plus probable de trouver plus de chaleur en Sibérie qu'au creux de mon cœur. Pourtant, l'âme cadavérique enfermée dans un corps bien réveillé, je ne peux plus me rendormir. Ma vue se pose sur le faux plafond en planches blanches qui me surplombe, décoré de quelques petites ampoules rappelant le ciel étoilé au milieu de la nuit. Je connais cet endroit. Mais je préfèrerais être dans les bras de l'obscurité et du silence plutôt qu'ici.
« Maxie ? »
C'est de ta faute si je me suis réveillée. L'ancienne ennemie du pays se penche doucement au-dessus de moi, gardant une distance respectueuse. Mes yeux suivent les vagues de ses cheveux colorés avant de ne se poser sur l'océan de ses iris. Lui dit-on suffisamment souvent que ses yeux sont les plus beaux de tous ? Son visage de poupée cachant les blessures d'un espion durement devenu soldat se plisse sous une émotion que je ne parviens pas à distinguer parmi les milliers de vagues déferlant dans ses yeux. Elle sourit tendrement bien que ses lèvres tremblent. Elle prend soin de retirer élégamment la mèche blanche qui me brisait la vue de l'œil gauche.
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How Villains Are Made - MARVEL
FanfictionL'hydre à plusieurs visages rampait dans l'ombre du SHIELD depuis sa défaite lors de la seconde guerre mondiale, attendant patiemment dans les ténèbres silencieuses que son heure vienne enfin. Plus le temps passait et plus son pouvoir grandissait, d...