Chapitre 127 : Le plan de l'équipe

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   C'est nul quand la seule personne qui peut te permettre de te sentir mieux est aussi la raison pour laquelle tu as pleuré. Dans ces circonstances, je n'ai aucune idée de ce que je pourrais dire lorsque je lui ferais de nouveau face. Je n'ai jamais réellement eu à recoller les morceaux avec qui que ce soit ; en général, lorsque quelqu'un est responsable de mes larmes, je me contente de lui coller une balle dans la tête pour arracher le problème à la racine. Mais ce n'est pas une voie que je pourrais envisager avec quelqu'un que j'aime tant. Mes pieds m'entraînent dans une danse avec l'anxiété, me contraignant de me déplacer de droite à gauche à une rapidité agaçante. Je ne sais vraiment pas ce que je pourrais lui dire. Et puis, peut-être qu'il est en colère contre moi. Peut-être qu'il n'a pas vraiment envie de me voir pour l'instant, peut-être qu'il est content de me savoir en train de ruminer dans un coin de la grange. Peut-être qu'il me hurlera de partir lorsqu'il me verra, peut-être qu'il ne m'écoutera même pas lorsque j'essaierais de lui parler. Peu importe. J'arrête ma marche infernale pour prendre une grande inspiration, regardant un vieil épouvantail stocké là. Qu'il accepte de m'écouter ou non, ça ne changera pas grand-chose. Il faut que je lui parle, même si je ne sais pas encore que lui dire. Ça viendra peut-être tout seul, lorsque je le verrais. Ou peut-être pas. De toute façon, je n'ai jamais été douée pour préparer un discours à l'avance, sauf lorsqu'il s'agit de mentir. Aujourd'hui, c'est différent : il faut que je lui dise ce que j'ai vraiment sur le cœur, et je ne pense pas que réfléchir à la façon dont je vais le dire m'aidera. Peu importe les mots que j'emploierai dans le feu de l'action, ils seront plus sincères. En espérant que je ne dise pas tout bonnement n'importe quoi.

« Allez l'épouvantail, souhaite-moi bonne chance, soupirais-je. »

Bon sang, je parle à un objet inanimé, maintenant. Je lève les yeux au ciel et décide de quitter la grange avec détermination. J'espère seulement que la première personne que je verrais ne sera pas la petite brunette à frange. Alors que je lève la tête après avoir passé la porte de la grange, je remarque que quelqu'un se trouve en travers de mon chemin. J'aperçois d'abord une paire de chaussures en toile blanches salies par la boue, avant de lever doucement les yeux vers l'obstacle ; au moment où mes pupilles entrent en contact avec celles de Steve, mes jambes se clouent dans les hautes herbes, alors que le reste de mon corps se fige sur place. Il est là. Lui aussi, voulait venir me voir. Je déglutis bruyamment, me contentant de le fixer de mes grands yeux écarquillés. Bon sang, qu'est-ce que je suis sensé lui dire, maintenant qu'il est là ? Je n'ai même pas eu le temps de rebrousser chemin pour mieux y réfléchir avant d'arriver à la maison. J'ai beau essayer d'y penser, rien ne me vient à l'esprit. Quoi que je fasse, j'ai terriblement peur de dire une connerie. Si ça se trouve, il est venu pour m'enguirlander et me tirer par les oreilles, pour me forcer à rejoindre l'équipe à l'intérieur. Ce serait son genre. Seulement pour s'assurer que je ne passe pas la nuit dans une grange humide avec de la paille à moitié pourrie pour seul matelas. Je crois qu'après quatre ans à se connaître, nous ne nous sommes jamais regardés avec autant de gêne, au point que chacun de nous se sent complètement stupide. En tout cas, moi, je me sens stupide. Je me sens ridicule, pour notre dispute passée. Certes, j'avais de quoi être en colère et je le suis toujours ; mais il voulait juste aider tout le monde, comme il le fait toujours. C'est difficile, de blâmer quelqu'un qui essaie simplement de faire le bien.

« Hm... heu... bafouille-t-il. »

Mes sourcils se plissent sous les larmes qui me menacent de nouveau. Bon sang, j'ai peur. J'ai peur de me disputer à nouveau. J'ai peur de ne pas être à la hauteur. J'ai peur de le faire fuir. J'ai peur de le perdre. Et ça, le perdre, je ne peux pas me le permettre. Il faudrait que je dise quelque chose. Mais quoi ? Je soupire d'exaspération contre moi-même et me secoue mentalement. Lorsque mes muscles se détendent un peu, je commence à faire un pas vers lui. Sans vraiment m'en rendre compte, je me suis même mise à courir. Ce n'est que lorsque mon front entre en contact avec son épaule que je me rends vraiment compte que j'ai fini par bouger. De peur qu'il s'en aille, j'entoure son torse de mes bras et le serre aussi fort que je le puisse contre moi. Quand ses bras m'enveloppent pour me compresser à l'intérieur, je me sens déjà un peu mieux. Je crois que nous n'avions jamais partagé d'étreinte aussi forte, et pourtant ce n'est pas la première fois que j'emploie toute ma force pour le garder au plus proche de mon cœur. La pression que ses bras exercent dans mon dos commence à me faire sincèrement mal aux vertèbres, mais il s'agit-là sans doute de la douleur la plus réconfortante que j'ai pu ressentir de toute ma vie. Parce qu'elle signifiait que lui aussi, avait terriblement envie de m'avoir près de lui. Parce que ça signifiait qu'il ne partirait pas.

How Villains Are Made - MARVELOù les histoires vivent. Découvrez maintenant