Chapitre 142 : Colocataires

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1 juillet 2016.

Les mains dans l'eau, je frotte une assiette avec une éponge dans l'espoir de faire partir les taches de sauce tomate de la veille. Encore à moitié réveillée, je suis tentée de me laisser basculer sur le côté pour que ma tête rencontre l'épaule de Steve, qui s'occupe d'essuyer la vaisselle que j'ai déjà lavée. Je rince l'assiette et la lui donne, ravie d'en avoir fini avec le nettoyage de notre tentative de spaghettis à la bolognaise, qui n'a eut l'avantage que de mettre un peu de couleur dans la cuisine aux murs blancs et jaunes cassé. Je me lave les mains pour enlever l'odeur du produit ménager qui trainait dans les placards depuis des années. Steve me tend un torchon ; je le lui prends en lui rendant son doux sourire. Une fois les mains sèches, j'en lève une vers mon visage alors que je me mets à bâiller comme une lionne. On ne peut pas prétendre que ma nuit fut réparatrice. Je n'ai fait que de me réveiller et de tourner dans tous les sens, incapable de trouver un coin confortable sur le lit de la chambre d'ami. Je me voyais mal dormir dans la chambre de ma grand-mère, ou même de ma mère, et encore moins dans ma chambre d'enfant – Steve ne serait pas rentré tout seul sur le petit lit, alors à deux, ça aurait été bien plus compliqué.

Je croyais que revenir en ce lieu que j'ai tant aimé lorsque j'étais jeune pourrait m'aider à me sentir un peu mieux. Je pensais pouvoir renouer avec moi-même, prendre une pause dans un lieu calme et sécurisé. Mais il faut croire que moins de vingt-quatre heures ont suffit pour faire peser sur moi un genre de malaise. Peut-être n'était-ce que passager. Peut-être que ça ira mieux ce soir. Je me le dis tous les jours depuis notre arrivée. En tout cas, j'ai vraiment besoin de dormir... et je ne crois pas que j'y arriverais en continuant de me faire du souci pour je-ne-sais-quoi. Steve me sort de mes pensées lorsqu'il pose une main sur ma tête pour m'ébouriffer les cheveux. Il ricane alors que je râle d'un faux agacement surtout lié à la fatigue.

« Tu as la tête dans les nuages ? Demande-t-il. Tu n'as pas bien dormi ?

- Hm... non, pas vraiment. Je crois que j'ai du mal à dormir dans cette maison. Mais ça ira peut-être mieux cette nuit.

- Si tu ne te sens pas bien, tu devrais retourner te coucher.

- Non... Marie a dit qu'elle viendrait aujourd'hui, je ne voudrais pas l'accueillir en pyjama. Je vais prendre une douche, ça me réveillera peut-être.

- D'accord. »

Il s'approche un peu pour m'embrasser le front, soucieux. Je lui souris tendrement avant de partir, ne manquant pas de lui claquer la fesse gauche de la paume de ma main. Je l'entends rire alors que je prends les escaliers, l'air de rien. Je rejoins la chambre d'ami pour y récupérer une robe d'été, puis vais dans la salle de bain pour me rafraîchir. Je pose mes vêtements sur le coin du meuble avant de lever les yeux vers le grand miroir, juste au-dessus du petit lavabo. Je sursaute en remarquant mon reflet, presque comme si je craignais que quelque chose se trouve derrière-moi. Bon sang, quelle idiote je fais... Je chasse mes pensées d'un coup de balai, puis fais chauffer l'eau avant d'entrer dans la petite douche. Quelque chose me monte au cœur, comme une aiguille qui s'enfoncerait avec une lenteur infernale dans mon organe vital. Fixée sur ce qui se trouve devant moi, je me sens craintive à l'idée de me retourner. J'ai le sentiment d'être épiée. Je déglutis à plusieurs reprises, essayant de laisser passer ce malaise qui me monte à la gorge, mais rien n'y fait. Je me dépêche de me laver et de m'habiller, séchant à peine mes cheveux avant de sortir de la salle de bain. Lorsque j'en referme la porte, les pieds nus dans le couloir, je sens cette pression commencer à s'atténuer. Mais, qu'est-ce qui m'arrive... ? Peut-être que le manque d'espace dans la pièce m'oppressait, et que je commence à développer un genre de claustrophobie. Oui, c'est sans aucun doute ce genre de chose. Je soupire lourdement et décide de rejoindre Steve. Je descends les escaliers en attachant mes cheveux dans un chignon bien peu joli, prenant mon temps pour me concentrer sans louper de marche. Je pose les pieds au rez-de-chaussée et regarde autour de moi, à la recherche de la moindre trace du soldat. Je traverse les pièces à sa recherche, jusqu'à ce que j'entende un craquement de bois provenant du jardin. J'approche de la sortie en souriant, cherchant le blond du regard. Il est près de la balançoire de mon enfance, une planche et un marteau en main. Je m'appuie sur l'embrassure de la porte en l'observant de loin, le laissant à son occupation.

How Villains Are Made - MARVELOù les histoires vivent. Découvrez maintenant