Chapitre 17 : Conversation enregistrée

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          Après ce passage très matinal dans le bureau de mon père, je rejoins la salle de regroupement de mon unité. Je la trouve cependant vide, ne voyant pas l'ombre des affaires de mes collègues dans leurs casiers. Me sentant terriblement seule dans cette pièce, je décide de repousser le travail que j'ai à faire pour aller me défouler. J'enfile l'une de mes tenues de sport bleue marine avant de traverser les couloirs pour sortir du bâtiment. Je m'étire avec précaution et pars courir autour des grands terrains d'entraînement du Triskel, ne faisant pas attention aux agents me dévisageant à chacun de mes passages devant eux. Je me contente d'abord de faire une course sans en compter les kilomètres parcourus, puis m'installe dans un coin du terrain inoccupé pour faire quelques étirements de yoga. Je me tords dans des positions assez agréables pour détendre chacun de mes muscles, sous le regard agaçant de mes collègues masculins jugeant de ma capacité à me courber en quelques acrobaties apparemment attirantes. Lorsque je m'appuie sur mes avant-bras pour faire un poirier et que j'étends les jambes en un grand-écart vertical, je remarque une ombre s'approchant de ma position. Je fronce les sourcils mais décide de ne pas réagir, jusqu'à ce qu'un collègue inattendu s'asseye dans l'herbe à mes côtés. C'est avec agilité que je me tourne pour remettre les jambes au sol, étendues devant moi, afin de pouvoir l'accueillir. Je lui lance un regard étonnée, détaillant sa peau humidifiée pour juger le nombre de kilomètres qu'il a pu parcourir en course ce matin.

« C'est à croire que de nos jours, personne n'est capable de laisser une femme faire ce qu'elle veut sans tenter de la sexualiser, s'agace-t-il. Toi qui es si impulsive par moment, je me demande comment tu fais pour ne pas les attaquer à chaque fois qu'ils te dévisagent. En mille-neuf-cent-quarante, un bon grand nombre d'entre eux se seraient pris une raclée par quelques-unes de mes amies.

- Steve, saluais-je. Il faut croire que je me suis habituée à ce genre de comportement, à tel point que je ne perds plus mon temps à y répondre. Et puis tu sais, même si leurs regards sont vraiment indécents, ce ne sont pas le genre de gars qui vont tenter de s'attaquer à quelqu'un comme moi.

- C'est quand même terrible de dire que tu t'es habituée à ce genre de comportement. C'est pareil avec Natasha, elle a fini par en avoir marre, et elle ne répond plus aux propos déplacés qu'on lui lance dans les couloirs. Mais, tu sais ce que je pense ? Si vous vous laissez marcher dessus, ils n'arrêteront jamais.

- Sans vouloir te mentir, j'ai beaucoup plus important à gérer en ce moment qu'une horde d'hommes en chaleur se comportant comme si leurs testicules parlaient à la place de leur cerveau. »

Je m'étire en avant, me penchant suffisamment pour que mon front frôle le sol. Steve soupire en lançant un regard à nos collègues, qui ont repris leur entraînement lorsque le soldat d'un autre temps s'est installé à mes côtés. Je me redresse pour jeter un œil à mon accompagnant. Le regard rivé vers l'horizon, il semble se perdre dans ses pensées au point de rejoindre des contrées assez lointaines pour que je sois incapable de le comprendre. Je décide de le taquiner, me mettant sur mes genoux pour lui secouer les cheveux.

« Qu'est-ce qui t'arrive, Rogers ? Demandais-je. Ne t'éloigne pas trop dans tes souvenirs, ou je crains que tu ne puisses plus jamais revenir.

- Je suis désolé, sourit-il. En vérité, je viens de remarquer à quel point tu me rappelles mon meilleur ami d'enfance, d'une certaine façon.

- C'est-à-dire ?

- Bucky était du genre à détester les injustices, les injures et les agressions, lorsqu'elles touchaient les autres. Mais lorsqu'il s'agissait de lui, il ne ripostait pas et regardait les gens l'attaquer avec le sourire. Tu fais exactement la même chose. Lorsqu'un homme dévisage tes formes, tu ne lui prête aucune attention, alors que lorsqu'un homme dévisage les formes de Natasha, tu l'attaques au quart de tour et tu n'hésites pas à griffer si nécessaire. »

How Villains Are Made - MARVELOù les histoires vivent. Découvrez maintenant