Eristia Univers

Chapitre 39 : Les premiers négociations.

Moonh et Aqua-Minh Khaas s'étaient aventurés dans les profondeurs de Clypeus Fenum, parcourant les sentiers sinueux qui menaient de village en village. Le paysage, marqué par des fortifications éparses et des champs cultivés, était le reflet d'une nation autrefois forte, mais désormais affaiblie par des guerres incessantes et une politique de plus en plus répressive.

Le premier village qu'ils visitèrent était Scutum, un petit hameau niché au pied d'une colline, entouré de murailles modérément imposantes, vestiges d'une époque où la défense était la priorité absolue. Les rues étaient calmes, presque désertes, et les rares habitants qui s'y aventuraient portaient des expressions d'épuisement et de résignation. La présence de Moonh et Aqua, bien que discrète, attira rapidement l'attention.

Moonh, vêtu de sa tenue de noble sombre et élégante, avançait avec une assurance naturelle. Sa fée Evie voletait à ses côtés, sa petite silhouette émettant une lueur douce mais perçante. Ensemble, ils pénétrèrent dans la mairie du village, un bâtiment modeste en pierre, où les attendaient quelques notables locaux, le maire Varron, un homme d'âge moyen au visage grave, en tête.

Varron leva les yeux lorsqu'ils entrèrent, les scrutant avec méfiance. « Qui êtes-vous ? » demanda-t-il, la voix empreinte de suspicion.

Moonh esquissa un sourire aimable. « Nous sommes des émissaires de la Guilde de Gaïa. Nous avons entendu parler des difficultés que traversent les villages de Clypeus Fenum sous la politique actuelle du Sanctuaire, et nous souhaitons discuter de ce que nous pourrions faire pour vous aider. »

Le maire haussa un sourcil, croisant les bras sur sa poitrine. « Aider, dites-vous ? Pourquoi devrions-nous vous faire confiance ? Les gens comme vous viennent souvent avec de grandes promesses, mais laissent derrière eux plus de misère que de réconfort. »

Aqua-Minh Khaas, qui était resté en retrait, fit un pas en avant, son armure brillant doucement sous la lumière des torches. « Je comprends vos réticences, » dit-il calmement, sa voix résonnant comme celle d'un chef de guerre ayant vu bien des batailles. « Moi-même, j'ai suivi la foi des Quator Deus pendant des années, croyant que leur voie était la seule qui puisse apporter la justice. Mais la vérité est que cette foi a été détournée, corrompue. Je ne suis plus favorable à cette guerre sainte. Un bon paladin doit défendre les faibles, les veuves et les orphelins, pas les opprimer. »

Varron écouta attentivement, ses yeux scrutant Aqua avec un mélange de curiosité et de doute. « Les paroles sont belles, mais comment puis-je savoir que vous n'êtes pas simplement ici pour exploiter notre situation ? »

Moonh, sentant que l'opportunité se présentait, intervint avec une diplomatie précise. « Nous ne sommes pas ici pour vous imposer quoi que ce soit, Maire Varron. Nous comprenons vos craintes, et nous respectons votre autonomie. Ce que nous proposons, c'est une alliance. Vous avez vu ce que le Sanctuaire fait à ceux qui ne sont pas en accord avec leurs idées. Ils ne vous défendent plus, ils vous contrôlent. »

Evie, ajoutant une touche de mysticisme à ses paroles, murmura doucement, ses ailes battant légèrement. « La rébellion ne signifie pas la destruction, mais la reconstruction de ce qui a été perdu. Nous ne voulons pas prendre le contrôle de vos villages. Nous voulons vous donner la force de défendre ce qui vous appartient. »

Le silence s'installa dans la pièce, alors que Varron réfléchissait aux propos de Moonh. Il n'était pas seul dans sa réflexion. Les autres notables, tout aussi méfiants, semblaient également évaluer la sincérité des visiteurs.

« Vous parlez de rébellion, » dit finalement Varron, sa voix un peu plus basse. « Mais que se passera-t-il si le Sanctuaire découvre que nous collaborons avec vous ? Ils enverront leurs paladins pour nous écraser. Nos forces sont faibles, nos défenses minces. »

Aqua hocha la tête, compréhensif. « Nous le savons. C'est pour cela que nous ne vous demandons pas de vous exposer immédiatement. Nous allons gagner le soutien de plusieurs villages, former une coalition qui pourra résister. Nous agirons avec prudence, et nous utiliserons chaque avantage à notre disposition pour minimiser les risques. »

Moonh reprit la parole, ses yeux perçants captant le regard du maire. « Vous n'êtes pas seuls, Varron. D'autres villages partagent vos préoccupations. Ensemble, nous pouvons former un front uni qui obligera le Sanctuaire à reconsidérer ses actions. Et si le moment vient où ils essaient de vous écraser, sachez que la Guilde de Gaïa sera là pour vous soutenir. »

Varron sembla peser les options qui s'offraient à lui. Finalement, il hocha lentement la tête. « Nous n'avons pas beaucoup d'alternatives, je le crains. Très bien. Je suis prêt à envisager cette alliance, mais avec prudence. »

Moonh esquissa un sourire satisfait. « Nous ne demandons rien de plus. La prudence est une arme tout aussi puissante que l'épée. »

Après avoir conclu cet accord tacite, Moonh et Aqua quittèrent la mairie, continuant leur périple vers d'autres villages tels que Castra Alba et Aegis, où ils rencontrèrent des sentiments similaires : méfiance, désillusion, et une peur palpable de voir leurs foyers détruits par une force supérieure. Chaque discussion, chaque parole prononcée par Moonh et Aqua renforçait leur influence, plantant les graines d'une révolte silencieuse mais croissante.

Pour chaque villageois, l'idée que la Guilde de Gaïa pourrait les utiliser pour ses propres fins n'était jamais loin de leurs pensées. Mais avec chaque parole soigneusement choisie, chaque promesse faite sans fausse note, Moonh et Aqua s'assuraient que la balance penchait lentement en leur faveur. La force de la diplomatie résidait dans sa subtilité, dans la capacité à transformer la peur en espoir.

Alors qu'ils continuaient leur mission, Moonh ne pouvait s'empêcher de penser au plan global de Madawan. C'était un plan d'une ingénierie redoutable, un jeu d'échecs où chaque village conquis, non par la force mais par la persuasion, était une pièce sur l'échiquier, prête à se mouvoir lorsque le moment serait venu de frapper.

Et dans l'ombre, Madawan observait, attendant patiemment que son plan se mette en place, pièce par pièce.