Dans la pénombre de ses quartiers, Arthur Defers fixait les papiers éparpillés sur sa table. Les primes, les rapports, les ordres de mission... Tout semblait flou, dénué de sens. Son esprit était ailleurs, tiraillé par des doutes de plus en plus pesants. Clypeus Fenum, sa patrie bien-aimée, était en train de changer sous ses yeux, et il ne pouvait plus ignorer les signes. Son Souverain, jadis un symbole d'autorité juste, se transformait en un tyran obsédé par la conquête, sourd aux conseils de ses plus fidèles stratèges.
Arthur se leva et se dirigea vers la petite fenêtre de sa chambre. La lueur des torches éclairait les rues de la capitale, jetant des ombres dansantes sur les murs. Il soupira profondément, cherchant un réconfort dans la familiarité de la ville qu'il avait juré de protéger. Mais ce soir, même cette vue ne parvenait pas à apaiser ses tourments intérieurs.
Il retourna à sa table, ses yeux s'arrêtant sur un document particulier : un avis de prime. Le nom inscrit dessus fit battre son cœur un peu plus vite. La Guilde de Gaïa. Cette guilde, considérée comme une entité noire par les Quator Deus, n'était pas qu'une simple rumeur. Elle était devenue une force à part entière, capable de renverser des batailles autrefois considérées comme perdues.
Arthur s'assit, fixant le nom inscrit à côté de celui de la guilde. Candice. Une ancienne cheftaine de la Garde Royale d'Arcania, désormais seconde de cette guilde redoutée. Une elfe au visage jeune, mais au regard qui en disait long sur les batailles qu'elle avait traversées. Ses cheveux, d'un rose vif avec des mèches rouges comme le feu, son espadon à la lame écarlate, et cette armure légère ornée d'un cristal rouge... Tout cela lui revenait en mémoire, comme un spectre du passé.
Arthur avait entendu des histoires à son sujet. Elle n'était pas seulement une guerrière redoutable ; elle était aussi une leader charismatique, capable d'inspirer une loyauté sans faille chez ceux qui la suivaient. Sous son commandement, la Guilde de Gaïa avait inversé le cours de la guerre dans les Hautes Mers du Sud d'Eristia, offrant une victoire inattendue aux flottes des Braves et de la Sainte Église de Celestia. Cette guilde, autrefois considérée comme une simple épine dans le pied des puissants, avait prouvé qu'elle était un adversaire redoutable, capable de défier même les plus grands empires.
Arthur se leva brusquement, pris d'une soudaine agitation. Et si... Et si la Guilde de Gaïa n'était pas l'ennemi que l'on croyait ? Leurs actions récentes ne suggéraient-elles pas qu'ils se battaient pour quelque chose de plus grand ? Peut-être pour une cause plus juste que celle de son propre Souverain ? Ces pensées le hantèrent, remettant en question tout ce qu'il avait cru jusque-là.
Il se passa une main tremblante sur le visage. Est-ce que Clypeus Fenum a perdu son chemin ? se demanda-t-il. Leur nation, construite sur des idéaux de défense et de protection, semblait désormais obsédée par l'idée de conquête. Le drapeau en forme de bouclier, symbole de leur philosophie de défense inébranlable, n'était plus qu'un lointain souvenir face aux ambitions démesurées de Sceptum Aegis.
Arthur regarda autour de lui, sentant soudain le poids de la surveillance constante. Baptiste de LaGarde. Cet homme avait été envoyé par le Souverain pour l'observer, le tester, le pousser à prouver sa loyauté. Mais Arthur savait que ce n'était pas qu'une simple mesure de précaution ; c'était une menace silencieuse, une épée de Damoclès suspendue au-dessus de sa tête. Baptiste n'hésiterait pas à l'éliminer si Arthur faiblissait ou montrait le moindre signe de trahison.
Mais peut-être que la véritable trahison serait de rester silencieux, de continuer à suivre aveuglément des ordres qui vont à l'encontre de tout ce en quoi je crois.
Il se rassit, tentant de calmer le tumulte de ses pensées. Devrais-je contacter la Guilde de Gaïa ? L'idée était audacieuse, dangereuse même. Mais quelque chose au fond de lui murmurait que cette guilde, et surtout Candice, pourrait être la clé pour comprendre le véritable enjeu de cette guerre. Peut-être même la clé pour restaurer l'honneur de Clypeus Fenum.
Mais comment pourrais-je les approcher sans éveiller les soupçons ? Baptiste était partout, ses yeux et ses oreilles toujours aux aguets. Arthur sentit une bouffée de colère monter en lui. Cet homme... Il me traque comme une bête, attend la moindre erreur pour me dénoncer. S'il devient un obstacle à ma quête de vérité, je n'aurai peut-être pas d'autre choix que de l'éliminer.
Arthur repoussa cette pensée violente avec difficulté. Je ne suis pas un assassin. Mais je suis un soldat. Et si ce soldat doit se battre pour la vérité, alors il le fera, quel qu'en soit le prix.
Les heures passèrent, et Arthur continua de peser le pour et le contre, chaque argument se heurtant à sa loyauté, à sa conscience, à ses devoirs. La tentation de tout laisser derrière lui, de trahir ce qu'il avait toujours protégé, se faisait de plus en plus forte. Mais au fond de lui, une voix persistait : Il y a encore une chance de sauver Clypeus Fenum, mais cela ne se fera pas en restant fidèle à des ordres injustes. Peut-être que la véritable loyauté est de se battre pour les idéaux qui ont toujours guidé notre nation.
Finalement, Arthur se leva, déterminé. Il savait ce qu'il devait faire. Il faut que je découvre la vérité. Même si cela signifie devoir jouer double jeu, même si cela signifie devoir éliminer Baptiste de LaGarde, je dois savoir si cette guerre vaut vraiment la peine d'être menée. Et pour cela, je dois entrer en contact avec la Guilde de Gaïa.
Il se dirigea vers la porte, sachant que la route devant lui serait semée d'embûches. Mais pour la première fois depuis des semaines, il se sentait en paix avec sa décision. Il n'allait pas trahir Clypeus Fenum ; il allait peut-être, contre toute attente, la sauver.
VOUS LISEZ
Eristia Univers
FantasyPlongez dans les mystères d'Eristia, un monde où le passé et le présent s'entrelacent dans une danse épique de magie, de guerre et de secrets oubliés. Au cœur de ce royaume tourmenté par des conflits millénaires, des héros et des aventuriers se dres...