Chapitre 2: Le grand jour !

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Les oreilles de la beast frétillèrent légèrement alors qu'un son grave et traînant en longueur parvenait jusqu'à elle. Elle ouvrit à moitié les yeux et se mit à compter. Sept. Sept tintements. Il était temps de se lever.

Syara s'assit dans son lit et s'étira tout en baillant à s'en décrocher la mâchoire. La nuit avait été difficile, entre l'excitation et la peur de ne pas se réveiller à temps, si bien que ce n'était pas de sa propre volonté, mais plutôt à cause de la fatigue de la veille qu'elle était tombée dans un profond sommeille.

Elle sortit de son lit et commença son petit rituel matinal. D'abord ouvrir les volets, ensuite déjeuner, se laver, s'habiller et enfin, partir à l'école. Ou plutôt, aujourd'hui, partir à la salle de cérémonie de la ville.

La jeune femme se rendit donc à sa fenêtre et poussa les deux battants pour laisser entrer la lumière et observer un peu le ciel. Gris sombre, menaçant, orageux... Comme d'habitude. Certaines histoires racontaient qu'avant le cataclysme, le ciel était bleu. Mais bon, elle, elle n'avait connu que celui-là de toute sa vie. D'ailleurs, quelque chose n'allait pas. Les nuages n'étaient pas assez sombres à son goût.

Merde ! Huit heures ! La beast avait loupé un tintement de cloche. Ou plutôt huit en comptant ceux de l'heure d'avant. Elle qui voulait se lever tôt pour avoir le temps de se préparer était maintenant en retard. Pour un des jours les plus importants de sa vie !

En quatrième vitesse, elle sauta dans son pantalon, enfila son bustier, jeta son manteau sur ses épaules et glissa dans ses chaussures. Elle s'apprêtait à sortir lorsque son regard croisa le reflet que lui renvoyait son miroir. Il n'y avait pas à dire, même les cheveux ébouriffés, elle avait fière allure. L'ensemble était totalement noir, exception faite de son manteau qui arborait de magnifiques arabesques argentées, remontant de ses genoux jusqu'à sa taille et de l'ourlet de ses manches jusqu'aux coudes. La tenue de cérémonie lui allait définitivement à ravir.

Mais trêve de narcissisme, si elle n'arrivait pas au lieu de la cérémonie à temps, tout ça ne lui servait à rien. Dans la précipitation, Syara claqua la porte de son appartement et se rendit compte, l'instant d'après, que les clés étaient restées à l'intérieur. Impossible de rentrer chez elle maintenant.

Tant pis, ce n'était pas la première fois qu'elle les oubliait. Elle défoncerait la porte une fois de plus, comme en témoignaient les nombreux impacts dessus, et le tour serait joué.

La jeune femme descendit les deux étages qui la séparait du rez-de-chaussée et se lança dans une course effrénée dans la ville. Les pensées traversaient son esprit à mesure que les rues défilaient devant ses yeux. « Vont-ils m'accepter si j'arrive en retard ? Pourquoi avoir choisi un endroit aussi éloigné de l'école ? Ils ne pouvaient pas faire ça dans la cour tout simplement ? J'ai faim. Pourquoi faut-il que ce soit au moment où on a le plus besoin d'énergie qu'elle nous fait défaut ? Tien, une nouvelle boutique vient d'ouvrir ! J'ai soif ! Ils en ont de la chance ses démons. Deux battements d'ailes et les voilà arrivés. Pourquoi tout ça n'arrive qu'à moi ? Ça m'énerve ! Et Kuta qui s'est enfui hier sans raison ! Je déteste quand il fait ça ! Si je le croise, il va m'entendre ! »

Sa course la mena tout droit sur une grande place où un grand nombre de personnes attendaient. Elle était arrivée à temps ! Essoufflée, à bout de forces, mais à temps. D'après ses estimations, il devait être aux alentours de huit heures et demie alors pourquoi personne n'étaient encore rentré ? Kuta devait sans doute avoir la réponse, mais le trouver dans cette marée humaine et non-humaine n'allait pas être facile.

— Syara !

Quand on parle du satyre, on y voit les cornes. D'ailleurs, toutes les pensées qu'elle avait eut lors de sa course s'étaient envolées. Toute sauf une : Kuta allait s'en prendre une !

La beast se tourna lentement vers le satyre qui, prudent, recula d'un pas.

— Houlà, je ne sais pas ce que je t'ai fait mais, avant que tu ne décides de me réduire en charpie, laisse-moi te donner ça, dit-il en tendant un sac devant lui.

 Qu'est-ce que c'est ? demanda-t-elle, intriguée.

— Ton petit-déjeuner. Je savais que tu arriverais en retard sans manger donc je t'ai pris un petit quelque chose.

— Ho, merci ! C'est trop gentil, rétorqua la beast en prenant le sac.

À l'intérieur, plusieurs viennoiseries étaient entassées. De quoi sustenter deux humains, ou une Syara, au choix. Ravie de cette attention, la beast mordit à pleines dents dans la première qu'elle attrapa.

— Attends un checonde, s'interrompit-elle. La bouche pleine. Comment cha tu chavais que j'allais arriver en retchard ?

— Tu peux répéter ? Je n'ai rien compris, Rit Kuta.

La jeune femme avala ce qu'elle avait dans la bouche et fixa son ami d'un air menaçant.

— Ne me force pas à me répéter ou tu vas le regretter, prévint-elle.

— Réfléchis deux minutes. Depuis qu'on se connaît, tu n'es jamais arrivée une seule fois à l'heure lorsque c'était à la fois important et le matin. L'examen de premier cycle ? En retard. Le deuxième ? En retard ! Le troisième ? Miracle ! Tu étais là à l'heure, mais c'était l'après midi. La sortie scolaire l'année dernière ? En retard ! Je continu ou tu as compris ?

— Continus et je t'en fous une, menaça la beast.

— Là encore, je te connais trop bien. Dix ans qu'on se connaît ! Dix ans que tu me menaces et pas une seule fois tu n'as posé la main sur moi, rit le satyre.

Syara n'en revenait pas. Elle était si prévisible que ça ? Il était si facile de lire en elle ? Sa réponse l'avait totalement désarmé. Enfin, en un sens, savoir qu'il la connaissait aussi bien qu'elle le connaissait la rassura.

— Votre attention s'il vous plaît !

La jeune femme reconnaissait cette voix. Elle appartenait à la professeure de chant qu'elle avait eue en quatrième et cinquième année. Elle se tourna pour voir où elle se trouvait et se rendit compte que tous les élèves fixaient l'établissement dominant la place. Deux options lui vinrent à l'esprit. Soit son ouïe déjà très fine s'était prodigieusement améliorée en une seconde. Soit la voix de l'enseignante était amplifiée d'une quelconque manière.

— On dirait que ça commence, trépigna Kuta.

Elle avait sa réponse. Kuta était presque sourd comme un pot par rapport à elle.

— Que tout le monde entre dans le calme ! La cérémonie se passera au dernier sous-sol du bâtiment. Prenez les escaliers à gauche après l'entrée et installez-vous dans le calme !

Le signal était donné, la cérémonie allait bientôt pouvoir commencer !

Le violon de cristal: les partitions perduesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant