Chapitre 21 : Premier combat

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Épées au clair et masses à la main, les bandits avançaient lentement vers Syara. À chaque fois qu'ils faisaient un pas, la beast reculait afin de maintenir la distance qui les séparait. À cet instant, la jeune femme commençait à regretter son côté impulsif. Elle était dedans jusqu'au cou, alors autant continuer jusqu'au bout de son plan.

— Attention, un rocher te fonce droit dessus ! hurla-t-elle à l'intention du voleur le plus proche.

Son doigt pointait pile entre deux arbres. Elle n'avait qu'une seule pensée en tête : pourvu qu'il comprenne.

— Tu crois vraiment que cette astuce stupide va marcher sur m...

Quelques sons graves sortis de nulle part et l'homme en tête du groupe ne put finir sa phrase. Une pierre de la taille de sa tête le heurta au niveau de l'épaule dans un craquement lugubre. La victime, projetée par le coup, buta contre un arbre et s'affala à ses pieds dans un cri de douleur.

— Une mage, c'est une mage !

— Mais où est son instrument ?

— Elle ne doit pas être seule, trouvez l'autre ! ordonna celui qui ressemblait le plus au chef de la bande.

Rapidement, le groupe se scinda en deux. La moitié épiait les environs à la recherche de Telak, tandis que l'autre tentait d'encercler Syara.

— Un autre rocher sur la gauche ! prévint l'apprentie mage.

Le bandit ciblé se tourna rapidement pour voir la menace potentielle et tomba, assommé par la pierre qu'il venait de se prendre à l'arrière du crâne. Cela en faisait deux de moins.

— Ho, pardon ! Je voulais dire à ma gauche, rectifia-t-elle avec un sourire narquois.

Le petit stratagème avait semé la confusion chez les ennemis. Cependant, ce plan toucha à sa fin avec le deuxième sort. Le beast de la bande avait localisé la cachette du bassiste et prévenu ses compagnons. En quelques battements d'ailes, le démon survola les bandits et atterrit aux côtés de son apprentie.

L'heure n'était plus à la ruse, mais bel et bien au combat. Syara invoqua son instrument, juste à temps pour parer une lame avec son archet et renvoyer son assaillant d'un coup de botte dans le ventre.

Elle n'avait ni le temps de composer une mélodie, ni l'expérience pour contrôler quoi que ce soit. La violoniste commença donc à jouer à l'instinct alors que les bandits fonçaient sur elle.

Rien. Aucun pouvoir ne sortait. La jeune femme ne dut son salut qu'à la réactivité de son mentor qui, la voyant en difficulté, érigea un mur de pierre pour la protéger. Pourquoi cela ne marchait pas ? La panique ? La précipitation ? Le manque de concentration ? Alors que ses questions tournaient dans sa tête, Syara sentit une douce chaleur au niveau de son cou. Le violon réagissait enfin à son appel.

Elle ne savait pas quel pouvoir elle avait invoqué et ne le sut que lorsque Telak la bouscula.

— Si tu pouvais éviter de soigner nos ennemis, ça m'arrangerait ! C'est déjà assez difficile de tenir autant de personne à distance !

Soigner ? Non ! Un, deux, trois... Onze. Le premier bandit à s'être pris une pierre était debout et prêt à combattre.

Comme le disait Telak, aucun d'entre eux n'arrivait à progresser. Il ne cessait de changer de rythme, de mélodie, d'intensité et, de ce fait, faisait tomber et voler un déluge de terre et de pierre sur ses adversaires. Le démon, contrairement à la beast, maîtrisait parfaitement ses pouvoirs.

Cela ne suffisait cependant pas. Petit à petit, les malfrats gagnaient du terrain et esquivaient de mieux en mieux les projectiles. Ça n'était pas le moment de baisser les bras. La violoniste, profitant de la couverture que lui offrait son compagnon, prit un court instant pour se faire une image mentale de ce qu'elle allait jouer.

Les yeux rivés sur l'un de ses adversaires, elle se mit à jouer un rythme lent et grave. Les images d'une forêt inhabitée et totalement immobile lui vinrent immédiatement à l'esprit. L'instrument chauffa à nouveau et, l'instant d'après, produisit un sifflement aigu.

Le bandit le plus à droite tomba, mort, coupé en deux de l'épaule à la hanche par une lame de vent. Lui, au moins, ne se relèverait pas. Ce n'était pourtant ni ce pouvoir qu'elle avait invoqué, ni cette personne qu'elle avait visée.

Animé par la rage d'avoir perdu un compagnon, l'un des voleurs passa outre les protections de Telak et assena un violent coup d'épée à l'apprentie mage. Encore une fois, la réactivité du bassiste sauva la vie de la jeune femme. Un pilier de terre sortit du sol, sous les pieds de l'assaillant, pour le déstabiliser. La lame atteignit sa cible au flan et ne provoqua qu'une blessure, certes douloureuse, mais superficielle à la beast, qui tomba à terre.

Paniquée, Syara recommença à jouer, d'un rythme rapide, et pria pour que son sort éloigne le plus loin possible son adversaire. L'homme, le bras levé pour assener le coup de grâce, se prit un véritable geyser en plein torse et s'écrasa lourdement contre un arbre, vingt mètres plus loin.

Après la violoniste, ce fut au tour du bassiste d'être en difficulté. Deux bandits avaient percé sa défense et l'attaquaient de front. Telak, bien qu'expérimenté, ne pouvait pas à la fois esquiver leurs assauts et maintenir les autres à distance.

Syara se releva, faisant fi de la douleur, et focalisa son attention sur les sept malfrats restant qui courraient vers elle. S'ils l'atteignaient, s'en serait fini d'elle. Elle devait faire quelque chose pour les ralentir.

Une nouvelle fois, la violoniste fit vibrer les cordes de son instrument et visualisa un mur de ronce devant elle. Au lieu du résultat escompté, un véritable lance-flamme carbonisa sur place l'un des assaillants et entoura les deux mages d'un mur de feu aussi haut que mortel.

Armé de sa basse, Telak asséna un prodigieux coup circulaire aux voleurs qui lui tenaient tête et les envoya rejoindre les autres bandits dans l'inconscience.

Le cercle de feu les coupait totalement du reste du groupe. À première vue, ils n'avaient aucun arc ni arbalète et ne pouvaient rien faire. La relique était du côté des mages et la distance les avantageaient. La victoire était à présent certaine et le chef l'avait compris.

— On se replie ! hurla-t-il.

Sous une pluie de pierres, les bandits s'enfuirent, non sans ramasser le plus de babioles possibles sur leur chemin.

Le combat n'avait duré que quelques minutes, mais avait essoufflé la beast, pourtant endurante. À bout de forces, Syara s'adossa à un arbre et se laissa glisser jusqu'au sol pendant que Telak étouffait les flammes en les recouvrant de terre.

Le violon de cristal: les partitions perduesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant