Chapitre 63 : la barrière invisible

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 L'expédition composée de cinq mages démons et d'une dizaine de soldats marchait depuis plusieurs heures dans la forêt de Trelazar, guidé par un élémental. Tous devaient bien admettre que sans lui, ce périple n'aurait pas été aussi aisé.

Par sa simple présence, les plantes qui bloquaient le passage s'écartaient pour les laisser passer alors qu'ils auraient été obligés de le frayer un chemin à coups de machette, sans compter que cela n'aurait pas arrangé la situation entre le groupe et les habitants de la forêt qui auraient pris ce geste pour une agression.

Le guide leur montra aussi des passages dissimulés dans le tronc de certains arbres. Véritables passerelles de téléportation, ils leur permirent de gagner des journées entières de marche et d'enfin arriver au cœur de la forêt en fin d'après-midi contre deux semaines les deux semaines de marche qu'ils avaient estimé.

Lorsqu'ils passèrent la dernière passerelle, tous purent admirer l'arbre mère. Ce monument de la nature dont la cime touchait presque les nuages trônait au centre d'une immense clairière qui pouvait sans aucun doute contenir une petite ville.

En peu de temps, le groupe fut totalement entouré d'élémentaux qui reprenaient espoir. Si les mages pouvaient briser la barrière, ils pourraient enfin retrouver leur foyer dans les branches de l'arbre gigantesque.

— Eh bien, avec autant de bois, je pourrais chauffer ma maison pendant toute ma vie, rit Grem en admirant le joyau de la forêt.

Cette plaisanterie ne plut guère aux habitants qui s'outrèrent d'un tel blasphème envers ce qu'ils considéraient presque comme une divinité et le démon dû se confondre en excuse pour éviter tout mal entendu. Peut-être que pour une fois, ce serait à Telak de sauver son ami et pas le contraire.

— En tout cas, je ne vois pas où est le problème, dit l'un des soldats. Votre arbre géant se trouve juste en face de vous, c'est difficile de le rater.

Avec un sourire narquois, l'homme avança d'un pas décidé et se heurta, après une centaine de mètres, à un mur invisible qui l'empêcha de passer.

— Tu savais qu'il se trouvait là ? Demanda Mor à sa comparse dotée d'une grande affinité avec la magie.

— Bien sûr.

— Et tu n'as pas pensé que ce serait une bonne idée de le prévenir ?

— Je voulais être sûre qu'ils comprennent bien le concept d'invisible. Je pense qu'avec son nez en sang, il l'a bien intégré, sourit Valana.

— Sadique.

— Merci, j'adore qu'on m'appelle comme ça.

Sans attendre que le soldat ne revienne à eux, le batteur le rejoignit et invoqua son instrument pour le soigner. Il ne se plaignit cependant pas de cette blessure et pesta contre sa propre stupidité. Par sa faute, il venait de décrédibiliser toute son escouade.

— Bon, on a assez rigolé. Valana, c'est à toi de jouer, ordonna Agrat.

La guitariste s'avança jusqu'à la petite trace de sang qui semblait léviter et posa sa main à côté. En fermant les yeux, elle commença à analyser chaque flux d'énergie qui constituait cette étrange barrière et arriva rapidement à une conclusion.

— Il va me falloir du temps pour trouver comment la détruire, dit elle avant de reprendre son travail.

Alors que Valana se concentrait, Telak en profita pour en apprendre un peu plus auprès des habitants de la forêt. Aidé par quelques soldats, il regroupa un maximum de monde autour de lui et commença à poser ces questions.

Ainsi, le bassiste apprit que la barrière était apparue en pleine nuit et que tous les élémentaux s'étaient retrouvés dans la clairière sans comprendre ce qui leur était arrivé. Cette dernière s'étendait bien plus haut que l'arbre mère et descendait bien plus profondément que ses racines.

Étonné, le démon leur demanda comment ils savaient cela, ce à quoi ils répondirent qu'ils pouvaient toujours communiquer avec l'arbre mère.

Le colosse de bois n'était pas en danger et ne comprenait pas lui-même ce qui arrivait où, du moins, il ne voulait pas révéler ce qui était arrivé.

Les questions suivantes portèrent sur le bien-être de la population. Même s'ils étaient inquiets, ils ne manquaient absolument de rien et s'étaient vite organisé pour construire des abris dans les branches d'autres arbres. Au moins, ils ne se laissaient pas abattre.

Après plus d'une heure à rester immobile devant le mur, Valana se retourna enfin vers le groupe.

— J'ai trouvé les failles, annonça-t-elle. Je vais avoir besoin de vous.

Tous les élémentaux furent stupéfaits. Depuis qu'elle était apparue, personne n'avait réussi à percer le secret de la barrière et cette inconnue disait pouvoir la briser après si peu de temps.

Sans tarder la guitariste emmena d'abord les soldats incapables de voler tout autour du mur et indiqua, par une petite étincelle lumineuse, l'endroit où ils devraient frapper à son signal. À chaque fois que l'un d'eux était assigné à un poste, Telak sortait une arme d'une de ses sacoches et lui remettait.

Une fois le tour effectué, Valana assigna de la même manière les soldats volants, puis ses propres compagnons. Elle avait gardé pour eux les failles les plus importantes. Celles qui requéraient une puissance importante, mais aussi celles qui aideraient le plus à la destruction du mur.

Une fois tout le monde en place, les mages préparèrent chacun les sorts qu'ils pensaient les plus efficaces. Agrat invoqua une lance immense qui lévitait à côté d'elle, Grem une puissante boule de feu et Telak une immense pointe en pierre qui, il l'espérait, serait assez résistant pour transpercer cette protection.

Valana s'occupa d'enchanter chaque arme et décupler la puissance de chaque sort. Mor, quant à lui, ne fut assigné à aucune faille. Ses pouvoirs de soins n'étaient pas vraiment d'une grande utilité. Il s'en servit tout de même, sous les ordres et au signal de la guitariste, pour créer une impulsion qui serait ressentie par tous pour donner le signal. Il était important que chaque faille soit exploitée en même temps et, en cela, son pouvoir était parfait.

Au hochement de tête de sa comparse, le batteur libéra une puissante vague curative qui recouvrit la clairière. Dès qu'ils le sentirent, tous, mages comme soldats, usèrent de leurs lames et de leurs sorts sur la petite étincelle qui brillait.

Les épées percèrent la barrière, la boule de feu explosa dessus, la lance la traversa et la pointe de pierre la transperça et agrandit le trou à mesure que le diamètre du cône augmentait et passait à travers.

Tout d'abord, un vrombissement sourd se fit entendre, puis, un bruit qui ressemblait étrangement à de la glace qui se fissurait. Des fissures se mirent alors à zébrer la structure invisible qui éclata dans un bruit de verre lorsque elles se rejoignirent.

Le mur s'effondra alors en une pluie de cristal qui disparut avant de blesser qui que se soit en bas. La barrière n'était plus. Outre le fait d'aider les élémentaux, le groupe de mage allait enfin savoir si ce qu'ils cherchaient était caché ici.

Le violon de cristal: les partitions perduesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant