Chapitre 107 : un interlocuteur intriguant

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 À peine quelques instants après être tombé nez à nez avec l'inconnu qui l'observait depuis sa sortie de la réunion du conseil, l'ami de Fos arriva à sa suite et écarquilla les yeux, étonné.

— Tiens, un autre humain. Tu sais, même si ça reste rare d'en voir dans le camp, ça n'est pas la peine de courir comme ça dès que tu en aperçois un. Par contre, son visage ne me dit rien, vous venez d'un autre camp de réfugié ?

— Il n'est pas humain, répondit Fos en jetant un regard noir sur la personne devant lui.

— Mais bien sûr, c'est un elfe. C'est bien connu, ils ont la peau blanche et des petites oreilles rondes.

— Je te dis qu'il n'est pas humain et qu'il ne fait qu'imiter l'apparence. J'ai donc deux questions. Pourquoi faire ça et qu'est-ce que vous me voulez ?

— Aller, arrête d'embêter ce monsieur et retournons au bar avant qu'on nous prenne nos places.

— Il a pourtant raison, je ne suis pas humain, répondit Shay. Qu'est-ce qui m'a trahi ?

— Vos yeux. Cela peut faire illusion chez les autres races, mais pas pour un autre humain. La pupille est ronde, pas en fente. Maintenant répondez à ma question et dites-moi ce que vous me voulez.

— Ça n'était pas la première que tu as posée, sourit le dragon. Je trouve que l'humain est très bien fait. Pas besoin de queue pour l'équilibre, des jambes faites pour l'endurance et permettant des mouvements bien plus agiles qu'avec des sabots, pas de cornes ou d'ailes qui incommodent lorsque l'on s'assoit ou qu'on s'allonge, un plus large éventail de trait physique que chez les elfes...

— Finalement, je me contre-fou de cette question. Dites-moi pourquoi vous me suivez et ce que vous me voulez !

L'impatience de Fos fit sourire Shay qui, au lieu de répondre tout de suite, préféra rester silencieux et observer ses réactions.

— Vous ne voulez pas répondre ? Très bien, mais arrêtez de me suivre ou vous le regretterez.

À ces mots, le violoniste tourna les talons et commença à rebrousser chemin pour retourner s'asseoir.

— Lorsque j'ai appris que des humains allaient être formé à la magie, j'étais sceptique, lâcha Shay.

Le début de réponse fut suffisant pour que le mage s'arrête, mais il lui faudrait développer un peu plus s'il voulait que cela l'intéresse assez pour qu'il se retourne pour lui faire face.

— Après tout, avant l'ouverture du portail, vous ne connaissiez pas la magie. Il était donc impensable que quelqu'un de votre espèce réussisse. Savoir que l'un d'eux avait réussi m'a étonné, mais j'ai été d'autant plus surpris lorsqu'on m'a raconté que ces pouvoirs dépassaient de loin ceux des autres mages. J'ai donc décidé de voir par moi-même cette personne.

— Et alors ? Pas trop déçu j'espère.

— Vous êtes impulsif et autoritaire. Cela pourrait me suffire pour que je décide que je ne vous aime pas, mais d'un autre côté, si vous n'aimez pas être suivi, ce comportement peut être justifié, je ne vous en tiens donc pas rigueur. Ce que j'aimerai, c'est vous connaître au travers d'un combat contre moi. On apprend beaucoup de choses sur quelqu'un lorsqu'on l'affronte.

— Vous voulez vous battre ? Et pourquoi j'accepterai ?

— Vous vous plaignez que personne ne vous écoute au conseil, que vous n'êtes là qu'en tant que pantin pour maintenir leur autorité sur les humains qui ont rejoint les camps des autres races. Battez-moi et je suis sûr que vous serez bien plus écouté.

Toujours dos à lui, Fos resta silencieux. S'il paraissait totalement impassible pendant qu'il réfléchissait, ça n'était pas le cas de son ami qui commençait à s'impatienter.

— Bon, tu fais quoi ?

— Je pense que je vais le suivre. Si ce qu'il dit est vrai, l'occasion est trop belle d'enfin me faire entendre. Tu viens avec moi ?

— Même si te voir te faire ridiculiser par un inconnu est un spectacle qui doit être plaisant à regarder, je préfère tout de même retourner finir mon verre au bar... Et le tiens par la même occasion.

— Comme tu voudras. Je te rejoindrais après, ça ne sera pas long.

— Comme tu veux, de toute façon, je ne compte pas bouger d'ici de la journée.

Tandis que son ami retournait s'asseoir à la terrasse du bar, Fos se retourna enfin pour faire face à Shay.

— Alors ? Faire ça en plein milieu de la rue ne serait pas convenable.

— Il y a un terrain d'entraînement à quelques rues d'ici, nous pourrons nous affronter sans craindre de tout détruire.

— Je vous suis.

Même s'il connaissait bien la ville depuis le temps qu'il s'y était installé, il n'avait aucune confiance en cette personne qui l'avait espionné et qui, de part sa manière d'agir, lui tapait sur les nerfs. De ce fait, il préféra marcher derrière lui plutôt qu'à ses côtés.

En quelques minutes, ils arrivèrent au terrain d'entraînement dont parlait Shay. A l'époque où la ville était encore debout, ce devait être un simple parking entouré par des immeubles d'habitation, mais ceux-ci n'avaient pas résisté à la guerre et s'étaient effondrés, créant encore plus d'espace.

Il n'était pas rare d'y trouver d'autres mages qui s'entraînaient à lancer leurs sorts ici, mais étrangement, l'endroit était totalement désert. Depuis qu'il avait rejoint le camp, jamais il n'avait vu cet endroit vide à cette heure de la journée. Cet inconnu était vraiment intriguant.

— J'ai du mal à croire que vous vous intéressez à moi uniquement parce que je suis humain, lâcha Fos en se tenant au centre du terrain vague.

— Je te l'ai dit, c'est surtout la force dont tu peux faire preuve qui m'intrigue. Je veux voir ça de mes propres yeux. Un conseil avant que nous commencions, n'hésite pas à t'y mettre comme si tu voulais me tuer.

— Comme vous voudrez, rétorqua le mage en invoquant son instrument. Mais avant tout, j'aimerai rajouter une close à notre combat.

— Dis toujours.

— Si je gagne, je veux tout savoir de vous.

— D'accord, faisons ça. C'est quand tu veux.

— Vous n'invoquez pas votre instrument ?

— pas pour l'instant, sourit Shay.

— Très bien, dans ce cas...

Le violon de cristal: les partitions perduesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant