Chapitre 66 : Rencontre désagréable (Syara)

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 Quelques jours après avoir rendu visite à Alan et aux enfants à l'orphelinat, Syara était redevenue celle qu'elle avait toujours été avant l'événement avec le cerbère. Elle avait profité de ces quelques jours d'absence de son coéquipier pour visiter et se familiariser un peu plus avec la ville qui était la sienne à présent.

Encore à moitié endormie, elle sortit de sa chambre et, à peine un pas plus tard, se prit les pieds dans des vêtements et manqua presque de tomber. Un peu plus réveillée par sa chute rattrapée in extremis, la beast observa un peu plus en détail son appartement.

L'endroit était sens dessus dessous. Des vêtements traînaient un peu partout, de la vaisselle sale était entassée dans la cuisine, ses instruments n'étaient pas rangés et des feuilles de partitions étaient éparpillées un peu partout. Depuis qu'elle était revenue à Léfarène, elle s'était clairement laissé aller et n'avait pas pris le temps de ranger et nettoyer son appartement.

C'était décidé, aujourd'hui, elle rangerait tout ce bazar. Elle commença tout d'abord par passer par la salle de bain pour se faire un brin de toilette, et se rendit compte que cet endroit était dans le même état que les autres pièces, puis, une fois lavée et habillée, débuta son ménage.

Si l'on devait chercher un adjectif pour la définir lorsqu'elle devait ranger, le terme distraite aurait été parfait. À chaque fois qu'elle ramassait une partition, la violoniste ne pouvait s'empêcher de la lire, prendre un instrument et reproduire la mélodie. Elle alla même jusqu'à continuer ou modifier certaines d'entre elles sans se soucier de la mission qu'elle s'était confier.

Au final, la corvée qui devait durer une partie de la matinée fut enfin achevée an milieu d'après-midi. Cela avait pris du temps, mais plus aucune de ses affaires ne traînait et l'appartement était aussi propre qu'au premier jour.

Exténuée et affamée, la jeune femme qui en avait même oublié de manger fouilla dans sa cuisine et dû se résigner à faire un horrible constat. Elle n'avait plus rien chez elle. Dépitée de ne pas pouvoir salir toute sa faisselle une nouvelle fois pour se faire un buffet géant, Syara prit la sacoche que lui avait offert son mentor, sa bourse et sortit de chez elle pour une corvée bien plus plaisante, les courses.

À plusieurs reprises ces derniers jours, la jeune femme était passée par le marché que lui avait montré Telak. La foule qui se massait près des étales, les commerçants qui les accueillaient avec le sourire, les odeurs toutes plus exquises les unes que les autres qui donnaient l'eau à la bouche. Elle trouverait sans aucun doute son bonheur ici.

En à peine une dizaine de minutes, elle s'imagina un grand nombre de plats qu'elle pourrait se faire. Son esprit était aussi productif pour la musique que pour la nourriture. Le seul problème était que, contrairement à la musique, chaque plat un tant soit peu élaboré finissait en véritable fiasco. Elle n'était définitivement pas bonne cuisinière malgré tous ses efforts pour le devenir.

Arrivé à l'autre bout de la place, Syara crut apercevoir, du coin de l'œil, un visage familier. Lorsqu'elle y prêta un peu plus attention, la personne avait disparu dans une ruelle entre deux bâtiments.

La beast se hâta de payer le marchand, rangea ses achats dans sa sacoche et rejoignit en vitesse la ruelle. La hauteur des immeubles et l'étroitesse du passage donnaient à cet endroit des airs lugubres de coupe-gorge. De ce fait, ce décor allait parfaitement avec la personne qu'elle voulait rattraper.

— Toi ! interpella-t-elle.

L'homme au bout de la rue se retourna et révéla son visage à la beast. Elle avait vu juste. Le satyre avec une corne cassée qui se trouvait devant elle était bel et bien celui qui faisait partie du groupe de bandit.

— Ho non, pas elle, souffla-t-il.

Sans lui laisser la moindre chance de fuir, Syara parcourut les quelques mètres qui les séparaient et le plaqua contre le mur, son avant-bras pressé sur sa jugulaire.

— Je t'avais pourtant prévenu que si je revoyais ta sale face, tu ne t'en sortirais pas ! grinça-t-elle entre ses dents.

Le satyre ne chercha ni à se débattre, ni à se justifier. Il se contenta de fermer les yeux et serrer les dents en attendant de se prendre une. Malgré son poing levé, le coup ne partit pas. La lame d'une rapière était apparue entre eux deux, juste sous la gorge de la beast.

— Qu'avons-nous là ? sourit la femme qui tenait l'arme. Assassin ? Voleuse ? Petite amie rancunière peut-être ?

Syara ne lui accorda même pas un regard, même si cette personne l'intriguait. Malgré ses sens développés, elle ne l'avait ni sentie, ni entendue arriver, et même à cet instant, il lui était difficile de sentir sa présence.

— Je vois que vous avez recruté un garde du corps. Ne crois pas que sa présence va changer quoi que se soit.

— Mais c'est que le louveteau montre les crocs, c'est tellement mignon. Fait attention, si tu continues, je vais finir par t'adopter.

S'il y avait bien une chose que la beast détestait, c'était d'être considérée comme un animal. Elle ne reniait aucunement ses origines, mais être comparée à une bête avait le don de l'énerver.

— Ne lui fais pas de mal, dit péniblement le satyre malgré la pression qu'exerçait Syara sur sa trachée. C'est elle, celle dont je t'ai parlé.

— C'est vrai qu'elle me ressemble, constata l'inconnue en rangeant son arme.

— Que vous ayez parlé de moi ou non ne change rien. Épargne-moi un temps fou et dis-moi où sont les autres. C'est soit ça, soit je placarde vos avis de recherche dans le hall des musiciens. Recherché, mort... Ou mort.

— Il y aura une récompense à la clé ? Demanda soudain la femme à la rapière.

— Disons cinq-cents pièces par tête.

— Merde. Je savais bien que j'aurai dû leur prendre lorsque je les ai tués.

Devant cette étrange réponse, Syara tourna enfin la tête vers elle. Leur ressemblance était troublante. Si l'on excluait les caractéristiques typiques des beasts et les yeux ambres aux pupilles fendues, cette femme était sont portrait craché. Qui était-elle ? Et pourquoi faisait-elle équipe avec ce bandit alors qu'elle affirmait les avoir tués ?

La jeune femme relâcha son emprise sur le satyre et se tourna totalement pour lui faire face. Elle sentait intérieurement que cette rencontre était importante. Il lui restait juste à déterminer si elle était de son côté ou non.

Le violon de cristal: les partitions perduesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant