Le violon de cristal: les partitions perdues

Chapitres 186 : Des pâtisseries alléchantes

 Vingt minutes ? Trente minutes ? Difficile d'estimer le temps qui s'était déjà écoulé depuis le début de cet épreuve. Avec la pression que représentait l'épée de Damoclès qui leur tomberai dessus si jamais elles échouaient, la notion de temps en devenait déformée. La fée, la beast et la demi-dragonne avait déjà arpenté plusieurs rues et était entrées dans quelques bâtiments susceptibles d'accueillir les partitions perdues. Parmi eux, elles avaient fouillé deux magasins de musique, sans succès. Même les vendeurs qu'elles avaient interrogés n'avaient pas su les aider.

Leurs pas les avaient finalement menées sur une grande place qui, vu le monde qui s'y trouvait, devait être le cœur de la ville. Là encore, cet endroit pouvait très bien être le lieu qu'elles recherchaient, mais après plusieurs minutes à en faire le tour, les partitions restaient toujours... Perdues.

Alors qu'elles s'apprêtaient à quitter la place, une douce odeur sucrée vint leur chatouiller les narines. C'était la première fois depuis qu'elles se trouvaient dans la réplique de ce monde que l'odeur de pollution disparaissait. En regardant autour d'elles, elles virent que ces senteurs provenaient d'une boulangerie dont la devanture était un grand comptoir où trônait, derrière une vitre, des pâtisseries en tout genre.

— Ça donne envie, commenta Elyazra.

— C'est vrai, admit Syara. Mais nous n'avons pas le temps de nous attarder sur...

Avant qu'elle n'ait fini sa phrase, un gargouillement se fit entendre et dura un long moment. Les deux jeunes femmes se tournèrent vers Phi qui regardait avec envie les pâtisseries alléchantes. La violoniste se souvint alors que son amie n'avait presque rien mangé de la journée. Le groupe ayant été invité à manger au réfectoire de l'école, la jeune fée n'avait pas osé sortir de sa cachette, de peur de se faire voir.

— Tu veux quelque chose ? questionna la beast.

— Non, ça ira, répondit-elle en sortant de l'état presque hypnotique dans lequel elle se trouvait. Le temps nous est compté, il vaudrait mieux continuer nos recherches.

— Nous n'avons pas arrêté de courir depuis le début de cette épreuve et tu n'as presque rien mangé aujourd'hui. Je préfère perdre cinq minutes pour que tu manges quelque chose plutôt que de repartir tout de suite et que tu fasses un malaise.

— Vous êtes sûres ?

— De toute façon, j'avais l'intention de me prendre quelque chose, argumenta Elyazra.

— Faisons une petite pause, cela nous permettra d'avoir les idées plus claires. Peut-être que nous trouverons une bonne piste en mangeant.

Alors qu'elles s'approchaient de la vitrine, Syara se remémora une conversation qu'elle avait eut avec la mère de Phi, la veille de son départ. Celle-ci avait émis l'hypothèse que, malgré le titre et toutes les responsabilités que sa fille avait à présent, il était possible qu'elle reparte du royaume pour les rejoindre. L'année passée à ne pas savoir où se trouvait sa fille, perdue dans ce vaste monde, avait été une véritable torture pour elle, même si elle comprenait son choix et préférait la savoir libre plutôt que mariée à quelqu'un qu'elle n'aimait pas.

Même si, à cet instant, Syara doutait fortement que la nouvelle reine les suive, elle avait tout de même promis à sa mère qu'elle veillerait sur elle et la protégerait si jamais elle venait à les rejoindre. Aujourd'hui, et même si le temps leur était compté, la beast comptait bien tenir sa promesse et cela passait par de petites choses comme lui acheter de quoi manger.

Pendant qu'elles attendaient leur tour pour commander, la violoniste pensa à autre chose. Elle était déjà passée devant des boulangeries similaires dans cette représentation du passé et aucune d'entre elles ne les avaient autant attiré. Connaissant Fos et son esprit tordu, il était même possible qu'il s'agisse d'un indice qui les mènerait aux partitions.

— Bonjour ! salua la vendeuse. Que puis-je faire pour vous ?

— Pour ma part, je vais prendre un mu... Muffin, commanda Elyazra.

— La même chose pour moi, ajouta Syara. Et toi Phi ?

Après un instant d'hésitation à fixer toutes les pâtisseries qui donnaient l'eau à la bouche, la jeune fée pointa l'une d'elles du doigt avec un large sourire.

— Je vais prendre un cookie family trois choco s'il vous plaît !

En moins de temps qu'il ne fallait pour le dire, les trois viennoiseries furent emballés dans des sacs en papiers et posées sur le comptoir. La vendeuse appuya alors sur un étrange panneau et releva la tête vers ses clientes.

— Deux muffins et un cookies family trois choco, résuma-t-elle. Cinq trente s'il vous plaît.

Sortant le compte de sa bourse, la beast déposa les pièces sur le comptoir et vit le regard étonné de la vendeuse. Quelque chose avait traversé l'esprit de la violoniste pendant qu'elle observait les autres clients commander et elle sentait que ce doute était sur le point de se confirmer.

— Je suis désolée, mais nous ne prenons pas ce genre de devise ici, grimaça la vendeuse. Si vous n'avez que ce genre de monnaie, je ne peux rien vous vendre. Vous devriez passer par un bureau de change, il y en a un de l'autre côté de la place.

Comme elle s'en doutait, mise à part la langue, tout avait été recréé à l'identique, même l'argent qui était utilisé à l'époque et qui avait fini par être remplacé pour que le monde entier ait la même devise.

Déçue, plus pour la jeune fée que pour elle-même, Syara et ses deux amies retournèrent sur le trottoir.

— Je suis désolée Phi.

— Ça n'est pas grave. J'y ai pensé dans la file et je me suis dit que cette boulangerie était peut-être un indice qui nous mènerait aux partitions.

— Je me suis dit la même chose, affirma la beast.

— La dame nous a dit d'aller à un bureau de change, peut-être qu'il s'agit du nouvel indice, supposa la jeune fée.

N'ayant aucune autre piste que celle-ci qui se basait uniquement sur un simple ressenti ainsi que des hypothèses sur la manière de fonctionner de l'esprit tordu de Fos, Syara, Elyazra et Phi traversèrent la place et se rendirent au bureau de change dans l'espoir de trouver un nouvel indice et de finir cette épreuve dans les temps.