Chapitre 67 : faire connaissance autour de cinq verres

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 — Tu les as tués ? demanda Syara.

— Environ la moitié, confirma l'inconnue. J'ai envoyé les autres à Sendra pour qu'ils aident à la reconstruction de la ville et j'ai pris Guard comme animal de compagnie.

— C'est encore plus dégradant qu'esclave, souffla le satyre.

— Toi, la ferme. Comment peux-tu être sûre qu'ils ne recommencent pas ?

— J'ai tué leur chef en premier ce qui a sapé leur envie de recommencer. Et crois-moi, je sais être très persuasive.

Guard, toujours collé contre le mur, se hâta de hocher la tête pour confirmer ses dires.

— En réalité, je lui ai proposé de m'accompagner après notre combat et il a accepté si mon but était d'aider les gens.

Étonnée, Syara arqua un sourcil et se tourna vers l'ancien satyre pour voir s'il avait quelque chose à dire.

— Je veux me racheter par moi-même auprès de la société et je pense que je serais plus utile en venant en aide aux citoyens plutôt qu'à croupir derrière des barreaux.

Sa réponse était censée, même si la beast n'était pas convaincu qu'il soit capable de faire quoi que se soit. Après tout, il n'avait pas été une réelle menace pour elle lors de leurs deux dernières rencontres. La question était de savoir si de bonnes actions pouvaient racheter toutes les mauvaises qu'il avait commises.

La jeune femme savait pertinemment que ce problème ne datait pas d'hier et n'avait à ce jour aucune réponse tranchée. Elle se contenta donc de reporter son attention sur celle qui lui ressemblait tant, avant d'enfoncer violemment son poing dans le visage du satyre qui, avec la puissance de l'impact, se cogna l'arrière du crâne contre le mur.

Le nez en sang, et avec une grimace de douleur, Guard se tint le visage, ses yeux trahissant son incompréhension.

— C'était le moins que je puisse faire pour le pardonner de ce qu'il a fait, expliqua-t-elle en haussant les épaules.

— J'adore cette fille ! s'exclama l'inconnue. Elyazra, enchantée.

— Syara, répondit la mage en serrant la main qu'elle lui tendait.

— Je sens qu'on va bien s'entendre. Eh bien Guard, tu as essayé de détrousser cette pauvre demoiselle fragile et sans défense, la moindre des choses serait de lui payer un coup à boire.

— Sans défense, bien sûr, marmonna-t-il le nez en sang.

— Tu as dit quelque chose ?

— Non, rien.

— Parfait, alors allons-y !

— Attends, je...

Avant que Syara n'ait le temps de rajouter quoi que ce soit, Elyazra la prit par le poignet et la força à la suivre. Pendant un instant, la mage essaya de se dégager, mais sa poigne était étonnamment forte, à tel point qu'elle avait l'impression d'être menottée. Un rapide regard vers le satyre lui indiqua que se débattre était tout simplement peine perdue.

La chasseresse emmena la beast à travers les rues. Sa démarche ressemblait à celle d'une gamine qui voulait montrer à sa meilleure amie un nouvel endroit de jeu. Le lieu en question n'avait cependant rien d'un endroit pour les enfants. Avec un large sourire, Elyazra poussa la porte du premier bar qu'elle trouva et alla s'installer à une table libre.

Enfin libérée, Syara caressa son poignet endolori et s'assit devant elle. Après tout, une bière ne lui ferait pas de mal.

— Par contre, j'ai donné ma bourse aux victimes que j'avais rencontrées à l'auberge donc il ne me reste plus rien, indiqua Guard en prenant place.

— Tu aurais pu le dire avant ! réprimanda Elyazra.

— Ca ne fait que peu de temps que nous voyageons ensemble, mais il ne m'a pas fallu longtemps pour m'apercevoir que tu n'écoutes rien quand tu as une idée derrière la tête. J'aurai très bien pu te le répéter tout le long du trajet, tu ne m'aurais entendu qu'au moment où tu te serais assise.

— C'est pas faux. Bon, eh bien c'est moi qui offre !

Pour Syara, la scène paraissait surréaliste. Elle s'apprêtait à boire avec une parfaite inconnue et un ancien ennemi. Cependant, l'impression qu'elle avait que cette rencontre était importante s'était vite transformé en une confiance presque aveugle envers cette personne dont elle ne connaissait absolument rien.

En apercevant les nouveaux clients, le serveur vint à leur table pour prendre la commande.

— Trois bières, commanda Elyazra. Et vous, vous prenez quoi ?

— Juste une pour moi, répondit Syara, décontenancé par cette étrange commande.

— La même chose.

Après avoir tout noté sur son calepin, le serveur retourna derrière le bar pour préparer la commande et revint peu de temps après pour les servir.

— Bon. Passons au cœur du sujet. Tu ne me connais pas, mais moi, j'ai l'impression que tout le monde ne parle que de toi et de ton ami démon.

— Tu connais Telak ?

— Guard et l'aubergiste qui tien l'établissement sur la route de Sendra m'ont parlé de vous. Selon lui, vous êtes les mages altruistes qui ont escorté des enfants gratuitement et vous leur avait même donné de l'argent pour qu'ils s'installent en ville. C'est aussi toi qui as sauvé Sendra. Je dois t'avouer que j'ai un peu de mal à le croire.

— Nous n'étions pas seuls. Sans les nombreux mages qui protégeaient la cité, je n'aurais jamais pu la sauver. De plus, c'était principalement de la chance. Je ne contrôle pas encore très bien mes pouvoirs et j'ai failli y passer plusieurs fois. Quant aux enfants, une chose horrible est arrivée à leurs parents. On m'avait donné comme mission de les retrouver, mais c'était trop tard. La moindre des choses était de les aider à s'installer autres part et faire en sorte qu'ils ne manquent de rien. C'est pour cela que je leur ai donné la récompense que j'avais reçue pour le sauvetage de la ville.

— Tu as fait tant de choses sans maîtriser tes pouvoirs ? C'est dommage, tu devrais t'entraîner sérieusement. Si tu veux, je peux te prêter Guard pour te servir de cible.

Face à cette proposition, le satyre manqua presque de s'étouffer avec sa bière. Il avait déjà assisté à ses pouvoirs et n'avait aucune envie de se retrouver ne face de nouveau.

— Non merci, déclina poliment Syara avec un sourire. Je suis consciente qu'il faut que je m'entraîne, mais avec le nombre de pouvoirs que je dois maîtriser, il me faut un instructeur où je n'arriverai à rien. Mais assez parlé de moi. J'ai l'étrange sensation de te connaître.

— Très bien. Que veux-tu savoir, dit Elyazra avec un large sourire.

Le violon de cristal: les partitions perduesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant