Chapitre 156 : En route pour l'orphelinat

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 À cause de la gueule de bois d'Elyazra, la visite à l'orphelinat ne cessait d'être retardé. La demi-dragonne avait bien pris son temps pour déjeuner, pour se préparer et, lorsque enfin elle se disait prête, elle marchait aussi vite qu'une grand-mère avec un déambulateur. À cela s'ajoutait l'une de ses dernières inventions qui consistait à se mettre un bandeau sur les yeux pour échapper à la lumière du jour.

Pendant le début du trajet, elle n'avait cessé d'assurer à Syara qu'elle pouvait parfaitement se déplacer ainsi et qu'elle pouvait très bien se rendre compte de ce qui l'entourait sans avoir recours à sa vue. Malgré tout, après trois-cents mètres, la beast lui retira et confisqua son bandeau après qu'elle soit rentrée dans quatre personnes différentes.

— Tu es un monstre tortionnaire, se plaignit-elle en plissant les yeux pour ne pas être incommodée par la lumière.

— Et toi, tu manques clairement de retenue et de civisme, rétorqua la violoniste.

— Phi, toi qui es si forte en soin, tu ne pourrais pas m'enlever ce mal de tête horrible ?

— Ne fais pas ça phi. Ce mal de tête fait partie de sa punition. Elle doit apprendre à se retenir en présence d'alcool.

La fée, invisible depuis qu'ils avaient quitté l'appartement regarda tour à tour la beast et la demi-dragonne. Elle avait compris que quelque chose n'allait pas chez Elyazra, mais son mal n'était pas clairement visible à l'extérieur. Elle alla donc se poser sur son épaule et posa ses mains sur sa joue.

En sentant Phi, Elyazra ne réagit pas et fit comme si de rien était. En se concentrant un peu, la fée comprit que son mal venait d'une substance nocive dans son sang, ainsi qu'à une certaine déshydratation. Contre la demande de Syara, la fée illumina ses mains et se concentra pour soigner le mal qui touchait son amie. Elle ne pouvait rien faire contre la déshydratation, mais au moins, en à peine quelques secondes, la substance nocive avait disparu de l'organisme de la demi-dragonne.

Cependant, contrairement à elle, le sort de soin qu'elle avait lancé n'était pas invisible, si bien que Syara avait vu une petite lumière briller sur la joue d'Elyazra qui, une fois qu'elle fut éteinte, arbora un large sourire.

— Tu es bien trop gentille, souffla la beast, désespérée.

— Merci Phi ! T'es la meilleure ! lança joyeusement Elyazra.

— On dirait que Phi a choisi son camp, rit Guard.

— Espèce d'ingrate ! Après tout ce que j'ai fait pour elle ! feignit de s'indigner la violoniste.

Pour toute réponse, Phi quitta l'épaule de la demi-dragonne pour rejoindre celle de la beast, puis l'embrassa sur la joue. Au moins, son sort de soin avait eu le mérite de faire un peu accélérer le pas à la demi-dragonne qui ne se traînait plus derrière en se plaignant qu'ils marchaient trop vite.

Grâce à cela, ils purent arriver devant l'orphelinat bien plus rapidement. Syara toqua à la porte et attendit que quelqu'un vienne lui ouvrir. Comme pour la dernière fois, ce fut l'elfe noire qui avait été engagée pour s'occuper des enfants qui vint ouvrir.

— Ho, bonjour Syara.

— Bonjour Yedeni, comment vas-tu ?

— Très bien, Très bien. Mais ne restez pas sur le pas de la porte, entrez, les invita-t-elle.

Acceptant l'invitation, le groupe pénétra dans l'orphelinat et, en peu de temps, fut totalement entouré par les enfants. Elyazra n'était jamais venue et s'étonna de voir que son amie était accueillie ici comme une véritable célébrité. Guard, cependant, restait en retrait. Il lui avait raconté que son chef, lorsqu'il était encore un bandit, avait attaqué le convoi composé uniquement d'enfants qui quittaient leur village après la mort de tous les adultes. Il n'avait pas vraiment envie de se faire reconnaître et c'était compréhensible.

Certains demandaient où elle était partie, d'autres voulaient savoir où était Rael pour qu'il leur raconte d'autres histoires. Ils ne pouvaient même plus avancer tellement les enfants les entouraient.

— Aller les petits monstres, laissez-les un peu tranquille. Ils reviendront vous voir plus tard, mais avant ça, je pense qu'ils sont là pour parler à grand-père.

— Nous sommes venus voir tout le monde, rit Syara, heureuse de tous les retrouver. On viendra jouer avec vous un peu plus tard, c'est promis.

Grâce à ces paroles, la beast réussi à disperser la foule et put enfin poser un pied devant elle pour aller rejoindre le grand-père. Toujours invisible, Phi était surexcitée à l'idée de se trouver dans un tel endroit. Il y avait plein d'enfants, plein de jouets, plein de rires. Elle n'avait qu'une seule envie, quitter l'épaule de Syara sur laquelle elle s'était de nouveau posée pendant le voyage pour tout découvrir de cet endroit. Peut-être même que son amie leur faisait assez confiance pour qu'elle puisse faire tomber son voile d'invisibilité ! Mais pour le moment, elle préférait ne rien faire pour éviter que l'on dise encore qu'elle avait fait une bêtise.

— Les enfants sont impatients de savoir où vos missions vous ont emmenés, dit l'elfe noire tout en les guidant jusqu'à une table du réfectoire de l'orphelinat et en servant une tasse de thé à chacun.

— Nous avons rencontré plein de gens et absolument rien ramené qui va nous aider à payer le loyer, répondit Elyazra avec un léger rire.

— D'après ce que j'ai compris, vous n'êtes pas vraiment du genre à courir après les récompenses.

— C'est vrai, confirma Guard. Mais il faut bien en rapporter quelques fois pour pouvoir vivre.

— Mais ne parlons pas de ça, coupa Syara. Nous ne sommes pas venus parler de nos problèmes d'argent. Je connais assez Alan pour savoir qu'il va vouloir me redonner l'argent que j'ai offert à l'orphelinat pour m'aider et ça, je ne veux pas que ça arrive.

— Vous êtes la bonté incarnée, complimenta Yedeni.

— Moui, enfin ça, ça dépend des jours et des personnes, râla la demi-dragonne en jetant un regard noir à sa colocataire.

Pour toute réponse, Syara se tourna vers elle et lui tira la langue, mais en regardant par-dessus l'épaule d'Elyazra, la beast aperçut quelque chose à travers la fenêtre. Assis à l'ombre, à l'extérieur, l'un des enfants arborait un visage triste et avait le regard vide vissé sur ses pieds.

— Il y a un problème avec cet enfant ?

— Oui, mais il ne veut rien nous dire, souffla l'elfe. J'ai remarqué qu'il faisait beaucoup de cauchemars ces temps-ci. Je pense qu'il rêve de ses parents.

— Si seulement quelqu'un pouvait l'aider, pensa Syara en se touchant l'épaule.

— Nous verrons avec Alan ce que nous pouvons faire. Je vais aller le chercher.

À ces mots, Yedeni se leva et repartit de là où elle était venue pour aller chercher le grand-père, laissant le groupe seul dans le réfectoire.

Le violon de cristal: les partitions perduesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant