Chapitre 44: départ du village

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La nuit qui suivit leur retour fut des plus mouvementé pour tout le monde. Les enfants, rassemblés dans les maisons les plus proches de celle du vieil homme, ne cessaient de pleurer et de faire des cauchemars. Certains, encore trop jeune pour comprendre ce qui était réellement arrivé, appelaient leurs parents.

— Ils devraient être habitués à ne pas les avoir auprès d'eux depuis un certain temps, non ? raisonna Telak.

— Les enfants sont plus sensibles que vous ne le pensez, ils sentent que quelque chose est arrivé à leurs parents, mais ils ne comprennent pas encore le concept de mort.

Jusqu'à ce que le jour se lève, le grand-père, le démon, la beast et les plus âgés parmi les enfants se relayèrent pour calmer les plus jeunes. Au matin, les deux mages attelèrent la plupart des chevaux à des charrettes. Ils en remplirent une entière avec les fournitures pour le voyage, en réservèrent une pour que les enfants puissent amener les objets auxquels ils tenaient et décidèrent que les trois dernières servirait à transporter les petits réfugiés. Une fois terminé, il restait encore trois chevaux qu'ils sellèrent.

— Un chacun, commenta le bassiste.

— Comment allons-nous nous organiser ?

— L'un de nous trois ouvre la marche, un autre la ferme et le dernier reste au milieu et s'assure que tout va bien.

— Je tiendrais ce dernier rôle si ça ne vous dérange pas, dit le grand-père en approchant.

— Y aura-t-il seulement assez d'enfant assez expérimenté pour conduire les charrettes ?

— Normalement oui, mais je nommerai les plus à l'aise pour conduire celles des enfants. Il ne devrait, de toute façon, pas y avoir de problème. Une fois la caravane formée, les chevaux devraient suivre naturellement ceux qui sont en tête.

— Dans ce cas, commençons l'évacuation du village, clama Telak.

Même si la nuit avait été difficile, la plupart des enfants étaient tombés de fatigue et dormaient à présent à poing fermé. Avec douceur, le grand-père les réveilla un à un et prépara un petit-déjeuner avec ce qu'il restait dans les réserves. Il expliqua ensuite comment allait se dérouler la journée.

Chaque enfant pouvait emmener ce qu'il voulait tant que ça n'était pas encombrant et que le tout tenait dans une seule charrette. Ils avaient une heure pour décider de ce qu'ils voulaient garder et devaient ensuite s'installer dans celles que le vieil homme désigna.

Au top départ, ceux au-dessus de six ans partirent chez eux et revinrent bien vite, les bras chargés d'objet en tout genre. Pour les plus jeunes, c'était une autre histoire. Ils ne comprenaient tout simplement pas pourquoi ils devaient faire ça et n'avaient soit aucune idée de quoi emmener, soit des demandes un peu trop grandes tel qu'un lit ou une armoire entière.

Même avec plusieurs personnes pour les guider dans leur choix, cette étape s'éternisa jusqu'à doubler le temps imposé par le grand-père.

La matinée était déjà bien entamée lorsque tous les préparatifs furent terminés. Les affaires dans une charrette, les enfants dans les autres. Ceux qui savaient diriger les attelages se mirent naturellement à la place du cocher et les trois adultes montèrent en selle. Sous les pleurs et les regards tristes en direction de ce village qu'ils avaient toujours connu, la caravane se mit en route, Telak en tête.

Le plan de route était le plus simple possible. Ils allaient longer la lisière de la forêt jusqu'à tomber sur la route qui menait à Léfarène et continuer vers le sud pour atteindre la ville. D'après les calculs du démon, si tout se passait bien, ils mettraient un jour et demi pour rejoindre l'auberge et une demi journée supplémentaire pour finir le voyage.

Deux heures passèrent et Telak était confiant. Aucune créature des plaines n'avait été signalé et rien de dangereux ne pouvait venir de la forêt. La bassiste ne comprenait toujours pas pourquoi les bêtes des plaines la craignaient tant. Pour l'avoir arpenté de long en large, il était certain que les choses les plus dangereuses qui y résidaient étaient des sangliers.

Ce fut pourtant de la forêt que survint un obstacle que Telak n'avait pas envisagé. Sans qu'il n'ait le temps d'invoquer son instrument, une bande de bandit surgit d'un fourrée et barrèrent la route de la caravane.

— Invoque ton instrument et je te transperce le cœur, annonça celui muni d'une arbalète.

Il les reconnaissait. Ces malfrats étaient ceux qu'ils avaient mis en déroute à l'allée. Cependant, cette fois-ci, il ne pouvait plus compter ni l'effet de surprise, ni su Syara qui était à court d'énergie depuis son combat contre le Cerbère.

— Vous avez investi dans des armes à distance ? Remarqua-t-il avec un haussement de sourcil.

Le démon était expérimenté et avait déjà affronté des bandits comme eux. Garder son sang froid et attendre le bon moment pour frapper était la plus sage des décisions.

— Tu ne pourras plus te cacher derrière tes jets de pierre, nargua l'un d'entre eux.

— Écoutez, souffla-t-il. Je comprends bien que vous m'en voulez pour la mort de vos compagnons et pour la guitare, mais là, j'escorte des enfants qui viennent de perdre leurs parents. Nous n'avons rien de valeur et les seuls choses que nous transportons sont des provisions et les dernières choses qui leur reste du village où ils sont nés. Ne leur enlevez pas ça.

Certains se regardèrent les uns les autres sans savoir quoi faire. Ils n'étaient visiblement pas au courant de ce qu'ils venaient braquer et hésitaient à intervenir. D'autre cependant, notamment le chef, se fendaient d'un sourire sadique.

— Que se passe-t-il ? demanda le grand-père en remontant la caravane.

— Eh bien eh bien, je croyais que vous n'aviez rien de valeur, mais quel est cette bourse qui pend à votre ceinture ? jubila le chef en pointant du doigt le cadeau qu'avait fait Syara au grand-père.

Syara arriva à son tour. Elle écarquilla les yeux de surprise pendant une seconde en voyant ce qui leur barrait le chemin mais reprit une expression neutre un instant après.

— Qu'avons-nous là. La chienne qui nous a volé notre trésor. Décidément, je vais me faire une joie de prendre tous vos biens... Rien que pour vous, j'irai même jusqu'à vous prendre vos vêtements !

La beast esquissa un geste et fut tout de suite dans la ligne de mire de l'arbalète.

— Un seul geste brusque, une seule envie d'invoquer ton violon et on transperce ton joli petit visage.

Sans rien dire, Syara descendit de sa monture et avança vers le chef, un regard meurtrier braqué sur lui. D'abord étonné, ce dernier commença à paniquer lorsqu'il vit que la violoniste ne ralentissait pas malgré le carreau pointé sur elle.

— Tire ! ordonna-t-il.

Trop tard, une seconde d'hésitation de son acolyte et Syara en profita pour lui assener un violent coup au visage qui le fit tomber à terre. Son visage était déformé par la rage. Elle se positionna sur le chef, bloqua toute tentative de faire quoi que se soit avec ses jambes et le rua de coup à la tête.

Les autres essayèrent de s'interposait, mais un simple regard dans leur direction les en dissuada. Elle n'était pas d'humeur et ça n'était pas un petit bout de bois propulsé par une corde tendue qui allait lui faire peur. Après une vingtaine de coups, la beast en assena un dernier de ses deux mains en hurlant de rage. Le visage du chef des bandits était méconnaissable sous tout ce sang.

Syara se releva finalement et jeta un dernier regard assassin vers les autres voleurs.

— Si je vous recroise un jour, vous vous sentirez chanceux si jamais vous finissez dans le même état que lui. Maintenant, barrez-vous avant que je ne change d'avis.

Les bandits ramassèrent leur chef et prirent leur jambe à leur coup. Ils ne savaient pas bien pourquoi ils ne l'avaient pas arrêté, ni pourquoi ils fuyaient, mais ils n'avaient aucune envie de se retrouver face à ce monstre qui avait mis dans cet état un des leurs sans prendre la peine de sortir une arme ou utiliser la magie.

Le violon de cristal: les partitions perduesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant