Chapitre 173 : Convaincre la reine

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 — J'aurai plusieurs remarques et questions avant de prendre ma décision, décida la reine.

— Nous sommes toute ouïe, annonça Fos.

— Premièrement, comment comptez-vous briser le cristal en deux ?

— Avec ceci, répondit le mage en invoquant son instrument.

Lorsque la reine vit le violon apparaître, elle ne put s'empêcher de se pencher de nouveau en avant. Le fait que l'instrument donnait l'impression d'avoir été sculpté directement dans un cristal similaire à celui qui leur permettait de survivre l'intriguait au plus haut point.

— J'ai pu voir que vous pouviez utiliser la magie directement avec vos mains et votre esprit. Nous, humains, devons passer par ce que nous appelons des instruments liés qui servent de lien entre nous et les énergies de la terre.

— Jamais je n'avais vu quelqu'un d'aussi puissant que lui, ajouta Shay. Nous nous sommes déjà affrontés par le passé, mais nous n'y sommes jamais allé sérieusement, si bien que je ne sais pas lequel de nous deux est le plus fort.

— Et vous, quel est votre instrument ? s'enquit Phindéréllia.

— Pour ma part, je suis un peu comme vous, je n'ai pas besoin d'instruments. Ce que vous voyez n'est d'ailleurs pas ma véritable forme. Si je vous montrais mon vrai visage, je ressemblerais à ceci.

Pour que les conseillers et la reine puissent se faire une idée de sa véritable apparence, Shay fit apparaître une représentation holographique de lui au milieu de la salle. Le dragon qu'il avait ainsi fait apparaître était aussi grand qu'eux, mais on pouvait déjà ressentir toute la puissance de cette bête aux griffes et aux crocs acérés.

— On dirait... Un lézard, commenta l'un des conseillers une fois la surprise et la légère peur qu'avait suscitées l'apparition passée.

— Oui, c'est à peu près ça... Sauf que si on le représente à sa taille normale, les griffes que vous voyez seraient aussi grosses que le cristal qui se trouve au milieu de votre ville.

De nouveau, cette annonce provoqua la surprise chez les fées qui se mirent à chuchoter entre elles. Leur montrer ceci n'était peut-être pas une si bonne idée que cela finalement. Cependant, savoir qu'une créature aussi puissante pouvait les aider pouvait aussi jouer en leur faveur. Au bout d'un certain temps, le calme revint et la reine put de nouveau prendre la parole.

— Vous n'êtes donc pas humain, conclut-elle. Malgré tout, vous vivez parmi eux et, comme nous vous l'avons dit, cela fait des générations que nous ne faisons pas confiance à cette espèce. Après tout, c'est elle qui nous a causé ce malheur.

— En effet. La magie est venue en ce monde avec d'autres espèces que les humains et la peur de l'inconnu et les préjugés ont pris le dessus sur la raison et la diplomatie. À cause de cela, nous avons blessé ce monde et engendré deux guerres qui ont été tout bonnement catastrophique. Il n'y a eu aucun gagnant. Mais comme vous dites, ce sont les hommes et leur guerre qui vous ont causé ces torts, il est donc naturel que ce soit un homme qui répare cette faute.

— Et qui me dit que vous n'allez pas nous trahir, vous emparer du cristal et vous enfuir avec en nous laissant dépérir. Si votre ami est aussi imposant sous sa véritable forme, il serait aisé pour lui de s'emparer du cristal et de partir sans que nous ne puissions rien faire.

— Malheureusement, je n'ai rien à proposer qui pourrait faire gage de caution. Rien mise à part ma parole.

— Alors qu'il en soit ainsi, donnez-nous votre parole.

— Je vous promet de...

— Non, pas ainsi.

Un instant, Fos eu un doute. Son sort de traduction avait-il bien interprété le mot parole ? La reine avait-elle bien compris qu'il s'agissait d'une promesse et non de sa voix ? Avant qu'il ne trouve de réponse, Phindéréllia se leva et un cercle de lumière doré se matérialisa autour d'elle. Un instant après, le même phénomène apparut autour du mage et du dragon.

— Étrangers, jurez-vous de ne pas vouloir de mal au peuple des fées ?

— Nous le jurons, assurèrent-ils d'une seule voix.

— Jurez-vous de vous en tenir à ce qui a été dit ici et de nous assurer qu'il restera assez d'énergie dans le cristal pour que le peuple des fées survive ?

— Nous le jurons.

— Jurez-vous qu'il n'arrivera rien à notre ville ?

— Nous le... commença Shay.

— Non, contredit Fos.

— Non ? s'étonna la reine.

— Votre ville se trouve tout autour du cristal et il est possible que le fait de le briser crée une explosion qui la rasera en grande partie. Tout ce que nous pouvons vous jurer, c'est que nous mettrons votre peuple en sécurité lors de l'opération et que nous vous aiderons à reconstruire votre ville si celle-ci venait à disparaître.

— Soit, qu'il en soit ainsi. Et que prévoyez-vous de faire si malgré la confiance que vous avez en vos pouvoirs, le cristal se brise entièrement ?

— Si cela venait à arriver, Je vous transporterait moi-même dans un endroit sûr, dans lequel vous pourrez vivre en paix et contenant autant de ressources que contenait cette forêt avant qu'elle ne se retrouve dans cet état, assura Shay.

— Le pouvez-vous vraiment ?

— Vous ne quittez pas ces terres parce que vous y êtes attachés, j'en suis conscient. Mais c'est aussi parce que vous ne supporteriez pas un voyage aussi long dans l'état où vous êtes. Avec ma forme originelle, je suis capable de parcourir de grandes distances en quelques heures là où cela vous prendrait des mois. Bien sûr, si nous échouons et que le cristal se brise, la terre ici finira par renaître et redeviendra une forêt luxuriante. Si vous le souhaitez, je pourrai aussi vous faire revenir lorsqu'elle se sera assez développée pour vous accueillir de nouveau.

— Le jurez-vous ?

— Je le jure.

— Alors qu'il en soit ainsi.

À ces mots, la lumière des cercles qui les entouraient s'intensifia et se mit à léviter jusqu'à se stabiliser au niveau de leur torse. Ceux-ci se mirent alors à rétrécir jusqu'à leur toucher la peau et les deux compagnons virent des inscriptions en lettre d'or marquer leurs bras. Après une rapide inspection, ils remarquèrent que ces signes parcourraient tout leur corps et s'étaient encrés en eux tel des tatouages.

— Le pacte est passé, annonça la reine. Respectez-le et ces symboles disparaîtront. Trahissez-le et vous mourrez sur le champ.

— Qu'il en soit ainsi, annonça Shay avec son sérieux habituel.

— Mais il est génial ce pouvoir ! s'exclama Fos. Je veux le même !

— Tu en as déjà bien assez comme ça !

— Mais lui je l'ai pas, répondit-il avec une voix d'enfant qui demanderait un jouet à ses parents.

— Conseillers, faites le tour de la ville, ordonna la reine. Je veux que tout mon peuple sans exception se réunisse sur la grande place. Tout le monde, sans exception !

— Comme il vous plaira, répondit le conseiller le plus âge.

À ces mots, les membres du conseil s'inclinèrent devant leur reine et s'en allèrent accomplir la mission qu'elle leur avait confié. Une fois les fées rassemblées et mises en sécurité, Fos et Shay allaient enfin pouvoir s'attaquer à leur mission.

Le violon de cristal: les partitions perduesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant