Avec un horrible mal de crâne, Fos se réveilla et tomba directement sur Shay. Le dragon était assis, accroupi à même le sol et adossé à un mur. Malgré ses pensées quelque peu embrouillées, le mage se souvenait avoir été piqué par quelque chose et s'être évanoui peu de temps après. D'ailleurs, cela était arrivé en pleine forêt et ils ne se trouvaient visiblement plus dedans.
— La prochaine fois que j'ai une idée aussi stupide que d'entrer dans une forêt sinistre, s'il te plaît, gifle-moi, grogna Fos en se relevant.
— Tu es enfin réveillé, il était temps, répondit Shay.
— Où sommes-nous ?
Pour toute réponse, le dragon lui fit un signe de la tête qui l'invitait à regarder dans la même direction que lui. Le mur opposé à eux n'était pas plein, mais fait de barreaux rapprochés de sorte que personne ne puisse sortir. Même un enfant n'aurait pas pu passer entre, pensa le violoniste.
— En cellule, conclut-il. Autre question. Si tu t'es réveillé avant moi, comment se fait-il que nous soyons encore là ? Tu aurais très bien pu nous faire évader.
— Deux raisons. La première est qu'il est hors de question que je te porte et que je fasse tout le travail pendant que tu te reposes. La seconde, c'est que je pense que tu seras aussi curieux que moi en voyant l'un de nos geôliers.
— Des personnes capables de créer une substance assez puissante pour assommer un dragon sans pour autant être mortel pour un humain. Je n'ai pas besoin de voir qui ils sont pour être intrigué.
— Ça ne marchera pas deux fois, affirma le dragon.
— C'est vrai, j'oubliais que le système immunitaire des dragons était absolument parfait et qu'il apprenait à combattre un poison dès la première dose.
— S'il était parfait, je n'aurais pas eu à attendre cette fameuse première dose pour être immunisé, contredit-il.
Alors que Fos allait répliquer, des bruits de pas se firent entendre de l'autre côté des barreaux. Sans doute attiré par leur discussion, l'un des geôliers venait vers eux. Lorsqu'il se présenta devant la cellule, le mage écarquilla les yeux, stupéfaits. Devant lui se tenait un homme maigre, aux joues creusées, aux cernes marquées, aux yeux rougis, bref, il avait l'air mal en point. Mais ce qui attira le plus son attention était sans aucun doute la paire d'ailes presque semblable à celles des libellules.
— J'ai beau avoir été au cœur des deux guerres et rencontré bon nombre de races, je ne connais pas celle-ci, dit Fos.
— Et je n'en ai jamais rencontré dans l'autre monde, ajouta Shay.
— Metera sinzu yo ! Dit le geôlier d'un ton autoritaire.
— Nous vous suivons, répondit le dragon en se levant.
L'homme ailé sortit une épée de son fourreau, puis une clé de sa poche pour ouvrir la cellule. De son côté, Shay restait debout, dans une position parfaitement neutre et invitait Fos à en faire de même.
— Tu connais cette langue ? s'étonna le mage.
— Absolument pas, pourquoi ?
Une fois la porte de la cellule ouverte, d'autres gardes vinrent devant la cellule et les entourèrent tandis qu'ils sortaient sans opposer la moindre résistance. Le couloir dans lequel ils se trouvaient était plutôt sombre et rien ne laissait deviner dans quelle direction se trouvait la sortie.
— Donc laisse-moi résumer. Tu ne parles pas leur langue, ils ne connaissent sans doute pas la nôtre et chacun en parlant la sienne, vous arrivez à vous comprendre...
— Iffa !
Ça, Fos n'avait pas besoin de connaître la langue pour deviner ce que le garde avait ordonné. Il était évident qu'il venait de leur demander de se taire.
— Iffa toi-même, je parle si je veux !
Énervé par cette réponse dont il n'avait compris qu'un mot, le garde tenta de frapper le mage au visage, mais celui-ci esquiva aisément et rit au nez du garde.
— Trois minutes... Tu n'auras tenu que trois minutes, souffla Shay. Si vous le permettez, je vais me mettre de côté pendant que vous le corrigez.
Le fait qu'il ne se laisse pas faire attisa la colère des autres hommes ailés qui tentèrent d'immobiliser Fos. Comme il l'avait dit, Shay alla s'adosser à un mur et regarda avec un léger sourire en coin son ami faire face à cinq adversaires. Seuls deux étaient restés en retrait pour garder un œil sur le dragon.
L'un de ceux qui faisait face au mage tenta de lui couper le souffle avec un coup de pied, mais avant d'atteindre sa cible, celle-ci se décala sur sa gauche, coinça la jambe de sa cible entre son flan et son bras droit, puis assena de son poing gauche un violent coup dans la trachée. Incapable de respirer, le garde porta ses mains à sa gorge et s'écroula à terre.
Les autres geôliers étaient prévenus. Devant eux ne se trouvait pas un débutant, mais un vétéran de guerre qui avait dû user de ses poings à de nombreuses reprises et qui s'y connaissait en combat rapproché. L'un des leurs étant déjà à terre, tous sortirent leurs armes. Même ceux qui gardaient Shay dégainèrent et croisèrent leur lame sur sa gorge pour qu'il ne bouge pas.
Deux geôliers amorcèrent un pas vers Fos, mais avant qu'ils n'aient le temps de faire quoi que ce soit, le mage leur donna à chacun un coup au niveau des poignets pour les désarmer. Continuant son mouvement, il ramassa les lames tombées à terre et s'en servit pour faucher les gardes sans armes.
— Il est bon hein ? plaisanta Shay à l'intention des deux personnes qui le gardaient.
Il ne restait que deux adversaires à Fos et il était maintenant armé. Le combat avait à peine commencé et il allait se terminer tout aussi rapidement. Cependant, Shay remarqua quelque chose d'étrange. Dans la main de l'un de ceux qui faisait face à son ami, du feu commençait à se former.
— Bon aller, ça suffit. Dormez ! ordonna le dragon.
À peine avait-il prononcé ces mots que les quatre gardes restants s'écroulèrent. Même ceux qui étaient déjà à terre étaient à présent plongés dans un profond sommeil.
— Je commençais tout juste à m'amuser, se plaignit Fos en lâchant ses armes.
— Justement, tu étais trop occupé à t'amuser pour voir...
— Le sort de feu que l'un deux préparait sans instruments ? le coupa-t-il. Ces personnes sont vraiment étranges. Sortons d'ici pour en apprendre plus sur eux... Et répond à ma question.
— Sur le fait que nous nous comprenons ? Questionna le dragon en s'avançant vers ce qui ressemblait à une sortie. C'est assez simple. Lorsqu'une personne parle, une partie de ses pensées se charge de représenter dans son esprit ce qu'il essaie de dire. Je ne fais que regarder ces images pour les interpréter. Quant au fait qu'ils me comprennent, je fais exactement la même chose, sauf que je leur envoie la représentation de ce que je veux dire.
— Pratique, commenta Fos. Tu m'apprendras ?
— Si tu veux, mais je ne pense pas que tu puisses y arriver sans ton...
Avant qu'il ne finisse sa phrase, Shay s'interrompit brusquement. Leurs pas les avaient menés à l'extérieur et ils se trouvaient sur une corniche à une dizaine de mètres du sol. Cependant, ce qui l'avait coupé dans sa phrase n'était pas cet élément, mais plutôt le cristal géant en face de lui qui devait faire dans les trente mètres de haut.
— Il est bien plus gros que ce que nous pensions, souffla-t-il.
VOUS LISEZ
Le violon de cristal: les partitions perdues
FantasíaDans un monde où musique est synonyme de magie, où presque toute forme de technologie à disparue, où les humains ne sont plus les seuls êtres pensants de la planète depuis bien longtemps et où la terre, ravagée par les guerres, se remet peu à peu, v...