Chapitre 109 : deux approches différentes

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 Pendant plusieurs minutes, Shay tenta tant bien que mal d'expliquer ce qu'il était réellement et de donner ses intentions en demandant à Fos de le combattre. Le violoniste était prêt à accepter presque tout. Avec toutes les choses étranges qui lui était arrivé depuis l'ouverture du portail, cela lui avait ouvert l'esprit. Cependant, il ne put s'empêcher de partir en un fou rire incontrôlable lorsqu'il lui révéla sa véritable nature draconnique.

Il avait tout simplement du mal à croire qu'il existait réellement des reptiles géants cracheurs de feu qui faisaient la taille d'immeubles. Déjà que la pilule de personnes aussi grandes que des hommes et pourvus d'ailes assez puissantes pour les faire voler était assez mal passée, cela lui semblait encore plus invraisemblable qu'il puisse réduire sa taille et son poids au point de ressembler à un humain.

Ce premier choc passé, Shay lui apprit qu'il existait de rares races qui pouvaient utiliser la magie sans avoir d'instruments. Il n'arrivait cependant pas à expliquer comment cela se faisait.

— Et pourquoi vouloir absolument m'affronter ? questionna Fos une fois les explications terminées.

— Comme je te l'ai dit, on m'a parlé de toi et de tes pouvoirs. Comme tu le pressentais, je t'ai observé pour en apprendre plus sur toi.

— Et qu'as-tu appris ?

— J'ai vu en toi l'espoir d'un monde en paix. Un meneur qui serait capable de reconstruire ce monde meurtri.

— Alors vas voir quelqu'un pour soigner tes yeux, je ne suis pas ça. J'ai uniquement accepté de faire partie du conseil pour que les humains ne soient pas mis de côté et considéré comme une sous-race.

— Mes yeux vont très bien. Je me suis rendu compte de mon erreur en t'affrontant. Tu t'emportes rapidement et ne réfléchi pas aux conséquences de tes actes. Tu es, au final, loin d'être le meneur que je pensais.

— Mes actes sont bien plus réfléchis que tu ne le crois. Ne te méprends pas, si tu as eu l'impression que je voulais te tuer, c'est que c'était le cas. Tu m'as toi-même dit qu'une victoire contre toi me donnerai de l'influence auprès du conseil, alors te tuer m'aurait donné bien plus de crédibilité. Si c'est le prix à payer pour sauver un grand nombre de personnes, alors je n'hésiterai pas une seconde.

— Est-ce la seule raison ?

— Non, je voulais aussi te donner une leçon. Ça ne se fait pas d'espionner les gens comme tu l'as fait.

— Et maintenant, je suis pardonné ?

— Si tu m'aides à annuler l'attaque que le conseil a prévue, alors je te pardonne.

— Tu penses au bien de la majorité, quitte à sacrifier des vies et pourtant, tu rejettes leur plan. Pourquoi ?

— Parce que c'est du suicide ! Le camp où se terre cet enfoiré de général est une véritable forteresse et eux, ils veulent attaquer la porte principale de front ! De plus, ils ont prévus de nous faire passer par une zone que les hommes ont bombardée. Vous ne vous rendez pas compte du danger qu'elles représentent. S'ils vont là-bas, ils mourront en moins d'une semaine et crachant du sang en même temps que leurs entrailles. Personne ne devrait entrer dans ce cratère avant des centaines d'années. Ils sous-estiment la puissance du général et le danger global.

— Et quelle est ton idée ?

— Au lieu de téléporter tout le monde dans ces ruines irradiées, je pense qu'il faudrait contourner par le nord, attaquer les camps de ravitaillement un par un et encercler la forteresse.

— Et pourquoi ne pas se téléporter directement dans la ville ?

— Parce que, par je ne sais quel moyen, ils ont réussi à créer un brouilleur qui perturbe les lignes de téléportation. La limite du brouilleur s'arrête dans la ville qui a été bombardée et c'est pour ça qu'ils veulent y aller. Ils pensent qu'en faisant cela, ils auront un quelconque effet de surprise.

— Alors qu'avec ton plan, ils sauront qu'on les attaque.

— Et enverrons des escouades pour reprendre les camps. Dans le plan du conseil, nous affronterons un ennemi avec, certes, un effet de surprise, mais aussi en pleine possession de ses moyens, avec toutes ses armes avec lui. Grâce à mon plan, nous seront attendu, mais il sera déjà affaibli.

— Dans les deux cas, ces plans ne me semblent pas viable, mais j'ai l'impression que tu ne me dis pas tout. Si tu veux mon appui auprès du conseil, il faut que je sache ce que tu veux faire exactement.

— Comme tu veux, mais pas ici. J'ai un ami et une bière qui m'attendent.

Avec un léger hochement de tête, Shay accepta de le suivre. En route, Fos se rappela quelque chose qu'il avait pensé pendant que son ancien adversaire lui avouait sa véritable nature. Depuis l'ouverture du portail, il n'avait pas entendu parler de dragons dans les rangs des autres races.

La raison était simple. Il n'en existait que très peu et ils ne montraient que très rarement leur véritable apparence. Dans l'ancien monde, il existait des créatures à l'apparence similaire aux dragons, mais bien plus hargneuses et agressives et, même s'ils avaient déjà essayé de plaider leur cause, les gens continuaient de les confondre ou de croire que ces créatures étaient les engeances des dragons. Ils avaient donc adopté la forme d'autres races pour ne pas être chassé et tué. Même ici, seuls les membres du conseil savaient réellement qui il était.

Les explications de Shay se finirent au moment où ils arrivèrent en vue du bar. Étrangement, l'ami de Fos n'était plus à sa table. Il avait pourtant l'habitude de rester ici plusieurs heures, alors où était-il ?

— Patron ! héla le violoniste en entrant dans le bâtiment. Tu n'aurais pas vu Rits par hasard ? Il était sur la terrasse lorsque je suis parti.

— Je crois que des personnes sont venues le voir, il est parti avec eux il y a une dizaine de minutes, répondit-il derrière son comptoir.

— Des personnes ? répéta Fos. Qui ?

— J'en sais rien, attend. Vetara !

En entendant son nom, la serveuse elfe entra dans le bar et se présenta devant son patron.

— Tu sais avec qui Ritz est parti ? demanda-t-il en mimant un maximum de mot pour qu'elle comprenne bien.

— Deux hommes. Eux emmener lui...

— De force ? s'enquit Shay.

— Non, mais lui semblait... Emialna.... Ils ont dit tout était prêt et qu'il fallait aller maintenant pour la... Oslamé.

Oslamé et Emialna. Deux mots elfiques que Fos ne connaissait pas. En quête d'une réponse, il se tourna vers le patron qui haussa les épaules, tout aussi perdu que lui.

— Il semblait réticent, traduisit le dragon. Ils ont dit que tout était prêt et qu'il fallait y aller maintenant pour la bataille.

— Quoi ? Maintenant ?

Fos rageait intérieurement. Il ne pouvait contredire les ordres du conseil que s'il avait un maximum de monde derrière lui, mais il ne pensait pas qu'il agirait aussi rapidement. Ritz avait été contraint de les suivre s'il ne voulait pas être considéré comme un déserteur. Le violoniste cherchait une solution pour sauver son ami, mais à part courir vers la place où devait avoir lieu le départ, il ne voyait pas vraiment ce qu'il pouvait faire d'autre.

— Bordel de merde ! hurla-t-il avant de se précipiter à l'extérieur.  

Le violon de cristal: les partitions perduesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant