Le violon de cristal: les partitions perdues

chapitre 136 : La seconde épreuve

 Après sa petite discussion amicale et sans animosité avec le roi, Syara était retournée sur la place en attendant l'arrivée du dernier concurrent. Cependant, le barrage des fées en colère était efficace. Tellement efficace que les seuls qui arrivaient à passer annonçaient systématiquement que leur perle avait été détruite.

Finalement, au bout d'une longue heure, quelqu'un réussit à forcer le passage avec la perle et était arrivé jusque devant le roi, se faisant qualifier immédiatement. Enfin, ils allaient pouvoir passer à la suite.

— Bien, souffla le roi qui pensait visiblement que ce serait plus rapide. Nous avons donc nos trente-deux qualifiés qui vont pouvoir se frotter à la deuxième épreuve. Je vous demanderais de prendre la perle que vous avez récupérée.

Tous impatients de passer à la suite, les concurrents obéirent et tendirent la sphère devant eux. Celle-ci se mit à se craqueler, provoquant d'abord la peur chez certains. Ils avaient eut tellement de mal à la préserver pour l'amener jusqu'ici, si elle se brisait maintenant, tous leurs efforts n'auraient servis à rien. Heureusement, le fait qu'elle se fissure ainsi était tout à fait normal. Les perles se mirent à exploser les unes après les autres et révélèrent, à l'intérieur, une boite en bois scellée.

C'était d'ailleurs très étrange. La beast avait vu plusieurs perles éclater pendant la première épreuve, mais aucune ne contenait un tel objet. Était-ce apparu à l'intérieur par magie ? Vu que les fées étaient capables de l'utiliser sans avoir recours à un instrument, il était possible que ce soit en effet le cas.

— Cette épreuve n'aura rien de spectaculaire, mais vous demandera de la réflexion, beaucoup de réflexion. Dans ces boites se trouvent des clés qui vous mèneront à l'épreuve finale. Le problème est qu'il n'y a que huit places pour cette épreuve, alors bonne chance.

Le départ aussi rapide prit la plupart des concurrents au dépourvu. Ils ne savaient pas vraiment quoi faire avec leur boite. Certains essayaient de forcer, sans succès, d'autres cherchaient comment les ouvrir en suivant le mécanisme.

— Un casse-tête ? Ça fait longtemps que je n'en ai pas fait, commenta Fos.

— Encore là ? Qu'est-ce qui t'arrive ? Pourquoi tu interviens autant ?

— Je m'ennuie, se contenta-t-il de répondre.

À deux, Syara et Fos cherchèrent le mécanisme pour ouvrir le petit coffre. Cependant, quelque chose n'allait pas. En une dizaine de minutes, alors que déjà trois boites avaient été ouvertes, tout le monde avait réussi à trouver au moins le premier mécanisme. Tout le monde sauf eux. Impossible de bouger quoi que ce soit, les pièces refusaient de bouger, coulisser, pivoter. Ils avaient l'impression que tout ce casse-tête avait été... Collé ?

Encore un coup du roi, elle en était certaine ! Que pouvait-elle faire ? Un quatrième venait déjà de gagner sa place pour la troisième épreuve et elle sentait qu'un cinquième n'allait pas tarder à les rejoindre.

Ce roi l'énervait au plus haut point et elle commençait à rager intérieurement. À tous les coups, il avait fait en sorte que la sienne soit impossible à ouvrir tout en s'assurant que la colle ou quoi que ce soit qu'il ait mis s'enlève si elle criait à la triche et que le roi devait résoudre le casse-tête lui-même. Sa supposition allait loin, mais vu le sourire qu'il arborait, elle était certaine de ce qu'elle avançait. La question demeurait... Comment ouvrir la boite ?

— Ceux qui ont essayé de forcer n'ont pas réussi...

Mais bien sûr ! Pourquoi n'y avait-elle pas pensé plus tôt ? Comme si elle avait trouvé la solution à l'énigme pour ouvrir la boite, Syara la déposa sur le sol devant le regard amusé du roi, puis sauta à pied joint dessus. Un léger craquement se fit entendre. Elle recommença l'opération sous les regards étonnés des autres participants et amusés des spectateurs.

— Aller Syara, montre leurs comment on résout les problèmes nous ! L'encouragea la demi-dragonne.

— Vous n'y arriverez jamais comme ça ! s'esclaffa le souverain.

Après avoir sauté une dizaine de fois dessus, la beast dut se rendre à l'évidence qu'il n'avait pas totalement tort. Elle avait certes fragilisé la boite, mais si elle voulait l'ouvrir à temps, elle devait s'y prendre autrement. Le cinquième qualifié se présenta avec sa clé devant le roi et celui-ci, avec un large sourire, jeta un regard amusé à Syara. Il avait gagné, il la savait et ça avait le don d'énerver la violoniste. Elle n'avait qu'une envie, lui envoyer quelque chose en pleine tête...

Comme une évidence, Syara se saisit de la boite et l'envoya en direction du roi aussi fort qu'elle le pouvait. Le père de Phi eut tout juste le temps de se baisser pour l'éviter. La boite se fracassa en mille morceaux contre le mur derrière.

— Non mais ça va pas ?! hurla le roi en se relevant.

— Vous avez demandé d'ouvrir la boite. J'ai lié l'utile à l'agréable, répondit-elle en haussant les épaules. Ça aurait été encore plus satisfaisant si vous ne l'aviez pas évité.

Alors que le roi grinçait des dents, Phi se baissa et ramassa, derrière son père, un petit objet doré. Syara s'empressa alors de la rejoindre une fois de plus. Pour les autres fées, tenir tête au roi ou faire des allers et retours sur leurs balcons ainsi était inconcevables.

Tenant la petite clé de ses deux mains, la princesse vit son prétendant approcher et finit par rougir légèrement lorsqu'il fut juste en face d'elle. Elle savait qu'il s'agissait en vérité de son amie et qu'elle ne voulait que la libérer du joug de son père, mais sous cette forme masculine, la jeune fée ne pouvait nier qu'elle éprouvait une certaine attirance pour lui.

— Vous avez réussi cette épreuve d'une façon peu conventionnelle, mais vous l'avez tout de même passée. Voici la clé qui vous permettra de vous rendre à l'épreuve suivante, annonça la princesse.

Le roi rageait. Sa fille venait d'annoncer la qualification de cette étrangère et, en parlant ainsi pour la première fois, elle venait d'annoncer son favori. Il ne pourrait plus rien faire à présent pour l'éliminer de la compétition.

— Merci princesse, sourit Syara en prenant la clé et en déposant un baiser sur son front. Ça ne sera plus très long, je vous le promets.

Avant de redescendre, Syara jeta un rapide coup d'œil à la boite pulvérisée aux pieds du roi. Certaines pièces étaient encore collées ensemble alors qu'elles n'auraient pas dû l'être, signe que sa boite avait été trafiquée pour qu'elle ne puisse pas l'ouvrir normalement. Le souverain était quelque peu gêné à cause de cette nouvelle tentative et de la discussion qu'il avait eu peu de temps avant qui lui promettait de mauvaise choses s'il recommençait.

La beast n'ajouta cependant rien et se contenta de redescendre une fois de plus du balcon sans mettre ses menaces à exécution. Plus que sept personnes à éliminer, et Phi serait sauvée. Voilà tout ce à quoi Syara pensait à cet instant.